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AUTOUR D’ALOÏSE
Mise en scène -‐ Sébastien R ibaux
Dog Production
AUTOUR D’ALOÏSE
Mon envie de créer un spectacle autour du personnage d’Aloïse Corbaz date de ma visite, à l’été
2012, de la double rétrospective de son œuvre à la Collection de l’Art Brut et au Musée cantonal des
Beaux-‐Arts à Lausanne.
Je suis plongé alors dans un univers fait de couleurs vives, de musique, de drames, de personnages
aux yeux voilés de bleu, de poésie, de salles de bal, de robes et de bijoux, de cris, de princes et
d’amour. Le souvenir le plus fort que j’ai gardé de cette exposition est qu’en sortant, je descendais
les escaliers du Palais de Rumine, je m’allumais une cigarette et je me sentais incroyablement en vie,
j’étais plein de désirs et d’envies comme rarement je ne l’avais été.
Je suis touché par cette rencontre artistique qui me renvoie sans détour à ma propre existence, qui
me rappelle sans concession que c’est ici et maintenant, qu’il faut cesser d’avoir peur des
égratignures et foncer…
Je me suis par la suite documenté sur Aloïse et son œuvre, j’ai découvert une femme au destin peu
commun, ayant vécu à la cour d’un empereur en Allemagne, puis internée dans un asile
psychiatrique à Gimmel durant quarante années ; et néanmoins débordante de vie pour créer une
œuvre picturale et littéraire foisonnante. J’ai découvert des écrits à la langue somptueuse
(notamment sa lettre d’amour à l’empereur Guillaume II) et tout un univers qui lui permettait
d’échapper à sa condition et d’inventer son monde propre et de vivre envers et contre tout. Je suis
ému par cette femme, son parcours de vie, sa force et la force de son univers artistique.
Il ne s’agit pas ici de faire un spectacle biographique sur Aloïse Corbaz, mais de travailler autour de
sensations issues des résonnances que son œuvre et sa vie peuvent avoir sur notre société, notre
mode de vie et nos valeurs actuels (l’enfermement, l’étrangeté comme ressource, la valeur que l’on
donne à sa vie et à ses rêves, l’histoire amoureuse). Sans aborder de front tous ces sujet, le parcours,
la démarche, la vie et l’œuvre d’Aloïse nous y renvoient de façon instinctive.
Au delà des écrits d’Aloïse, je m’appuierai également sur toutes les références qui parcourent son
œuvre : la musique, les héroïnes d’opéra, le théâtre et ses amoureuses éconduites et j’espère bien
vous emmener à ce bal de la vie qu’Aloïse nous propose de danser, avec ses espoirs, ses déceptions,
ses petites morts et ses renaissances, car après tout, ce qui compte, c‘est de danser !
ALOÏSE CORBAZ
Plus connue sous son prénom Aloïse, née à Lausanne le 28 juin 1886 et morte à Gimel, le
5 avril 1964, était une artiste suisse liée à l'Art brut, dont elle est une figure emblématique.
Petite, son rêve est de devenir cantatrice. Elle perd sa mère, d'origine paysanne, à 11 ans. Son père
est employé des postes. À 18 ans, après avoir obtenu un diplôme de culture générale à l'école
secondaire et suivi des cours de chant, elle s'inscrit à l'école professionnelle de couture de Lausanne.
Elle exerce un temps comme surveillante dans divers pensionnats lausannois.
Elle tombe ensuite follement amoureuse d'un prêtre français défroqué, Joseph Sauvage, venu
étudier la théologie protestante à la faculté de théologie libre de Lausanne, et qui vivait dans la
maison voisine, chez son frère Henri. Les amants se retrouvaient le soir en secret et échangeaient
une ardente correspondance aujourd'hui détruite. Une fois découverte, cette liaison fit grand bruit
dans la famille. Elle doit le quitter en 1911 sous les menaces de sa sœur aînée qui l'envoie en
Allemagne pour mettre fin au scandale. Là, elle travaille comme gouvernante d'enfants une
quinzaine de jours chez une famille noble de Leipzig, quelques mois à Berlin, puis environ dix-‐huit
mois à Potsdam. Aloïse y rencontre le chapelain de l'empereur Guillaume II qui l'engage comme
gouvernante de ses filles à la cour. Elle est libre de se promener dans le parc de Sans-‐Souci et chante
Haendel à la chapelle. Elle s’éprend alors éperdument de l’empereur et vit une passion amoureuse
imaginaire.
Aloïse rentre en Suisse avant la Première Guerre mondiale. Elle serait rentrée vraisemblablement en
1913, au terme d'un voyage «effroyable». Les sources divergent sur les circonstances de son retour.
L'une des sœurs mentionna des signes de déraison et un état physique déplorable dès son arrivée,
celui-‐ci ayant pu mener à son rapatriement. La seconde déclara que la guerre l'avait «surprise». Le 28
avril 1917, elle écrivit sa Lettre à Guillaume II, un courrier jamais parvenu à son destinataire dans
lequel elle déclarait sa flamme à l'empereur. Elle passe alors par des crises d’agitation, de zèle
religieux, humanitaire et antimilitariste qui décident sa famille à la faire interner en 1918 à l’Asile de
Cery à Prilly près de Lausanne. Le diagnostic de «démence précoce» (c’est le nom que l’on donnait
encore à la schizophrénie) fait état de son intelligence, de sa mémoire, ainsi que d’idées délirantes,
de dissociation du langage et de l’apparition de néologismes. Son état évolue vers l’autisme,
entrecoupé d’explosions de violence et d’érotisme à l’égard des médecins.
Dès 1920, elle est internée jusqu’à sa mort (1964) à l'asile de la Rosière à Gimel, dépendance de
l’hôpital de Cery où elle offre ses services pour repasser et raccommoder les tabliers des infirmières.
Elle commence à écrire et à dessiner sur sa table de repassage dès les années 1920, au départ avec
des moyens de fortune, puis avec du matériel fourni par certains médecins et infirmières. Elle
continuera de créer jusqu'à sa mort.
SON ŒUVRE
Les œuvres d'Aloïse sont préservées grâce à l'intérêt que leur porte le professeur Hans Steck,
psychiatre à Cery dès 1920 et directeur de l'hôpital à partir de 1936, et Jacqueline Porret-‐Forel,
médecin généraliste qui rend visite régulièrement à Aloïse dès 1941. En 1947, Jean Dubuffet
rencontre l'artiste et l'intègre à ses collections d'Art brut. Elle en devient une figure majeure et son
œuvre acquiert avec le temps une renommée internationale.
Aloïse réalise des œuvres de formes et de dimensions variées (dessins et peintures isolés, cahiers,
rouleaux de plusieurs mètres). Souvent, elle coud plusieurs feuilles de papier d'emballage entre elles
pour obtenir de plus grands formats. Elle utilise la mine de plomb, des crayons de couleur et des
craies grasses et couvre volontiers tout l'espace disponible, sur les deux faces de ses supports.
Ponctuellement, elle peint à la gouache et, à la fin de sa vie, se sert de stylos feutres. Certaines
œuvres comportent de petits papiers cousus ou collés à la surface dessinée. Il s'agit d'illustrations
provenant de journaux, de magazines ou de cartes postales, etc. En écho au dessin, Aloïse parsème
ses œuvres de nombreux mots et de phrases.
Elle emploie ses crayons d’une façon des plus simples, par aires coloriées en à-‐plat sans
qu’interviennent guère de modelés ni, sinon rarement, de mélanges ou associations de deux
différentes couleurs. Elle n’utilise d’ailleurs que certains des crayons de la boîte en petit nombre, le
gris et le brun ne trouvant presque jamais d’emploi et le noir généralement proscrit. Le bleu azur, le
rouge vif, l’orange, le vert clair, le jaune d’or abondent. D’être constitués de ces crayonnages, de
facture impatiente, mais rageusement appuyés (Aloïse était pleine de vitalité et d’énergie) procure
aux à-‐plats d’apparaître non pas du tout comme placards opaques mais au contraire chatoyants dans
un heureux effet de nuancement et transparence.
Les thèmes que l'on retrouve régulièrement dans son œuvre sont le couple amoureux, le théâtre,
l'opéra, ou encore l'Adoration des Mages. Beaucoup de scènes se déroulent sur fond de fêtes de
Pâques ou de Noël. Aloïse représente des personnages historiques ou de fiction, la plupart avec des
yeux bleus sans prunelle très caractéristiques. Nombreux sont les symboles et les messages contenus
dans son œuvre. Celui-‐ci a constitué pour elle une véritable renaissance.
Une partie de ses œuvres est aujourd'hui conservée à la Collection de l'Art Brut à Lausanne et au
Kunstmuseum (Musée de Beaux Arts) de Soleure, ainsi qu'au LaM de Villeneuve-‐d'Ascq. En été 2012,
à l'occasion de la parution en ligne du catalogue raisonné de son oeuvre, la ville de Lausanne
organise une double rétrospective intitulée Aloïse -‐ Le ricochet solaire présentée conjointement par
le Musée cantonal des Beaux-‐Arts de Lausanne et la Collection de l'Art Brut. C'est l'événement le plus
important jamais consacré à cette artiste réunissant près de trois cents pièces
Aloïse, c’est l’histoire d’un meurtre et d’une renaissance. Le meurtre d’une femme douée, passionnée,
ambitieuse mais systématiquement éconduite de ses aspirations affectives, culturelles,
professionnelles, niée dans sa personne et internée dans la fleur de l’âge, à une époque où l’asile
psychiatrique était encore essentiellement un lieu de détention. Lorsqu’elle est revenue à elle à
l’hôpital psychiatrique après avoir été dépossédée de tout, et d’abord de sa propre personne, elle a
entrepris le deuil de ce monde ancien naturel d’autrefois et de son corps. Elle s’est servie de l’écriture
et de la peinture pour nier le monde qui la niait. C’est le moyen pour elle de s’absenter, de se mettre
hors d’elle.
Aloïse dessinait dans un état de concentration extrême, nous dit-‐on, sans hésitation, hâtivement et
même avec emportement, comme si elle devait se devancer, aller plus vite que son ombre, court-‐
circuiter toute réappropriation consciente. Aloïse ne s’est pas livrée à la peinture comme à une
occupation de malade internée mais comme à l’unique solution de survie.
Michel Thévoz
LE THEATRE D’ALOÏSE : UNE FORCE DE VIE
Je peins des personnages que j’ai vu dans les théâtres, et j’ai juré que je les représenterai. Je copie ce
que j’entends, je pense à un théâtre et je crois bien que jamais il n’y en aura de pareil.
Aloïse
Toutes les peintures d’Aloïse me font penser à des scènes de théâtre ou d’opéra. Exclue de la vie du
monde naturel, brûlant de sentiment qui cherchent un exutoire, Aloïse représente le monde comme
un grand théâtre. La fiction dramatique ouvre la porte à toutes les possibilités que la vie lui a
refusées. Elle lui permet de s’identifier avec les grandes amoureuses, héroïnes, princesses de
l’histoire. Elle est à la fois le créateur et les créatures, le montreur de marionnettes et les guignols
comme elle aime à appeler ses personnages. Elle peut ainsi aborder par la bande une réalité qu’elle
n’ose et ne peut affronter.
En dehors du lien direct que cette démarche constitue pour nos métiers du théâtre où nous tentons
de dire autrement, de créer des univers pour voir et appréhender par un autre angle la réalité et
tenter de la comprendre ou de mieux faire avec ; c’est les notions du désir et d’énergie de vie dont
fait preuve Aloïse qui se dégagent fortement. Elle a su créer un univers de magie, de couleurs, de
princesses, d’explosions, de beauté. Elle s’est créée un univers plus fort que sa réalité à la clinique de
la Rosière à Gimmel. Elle s’est autorisée de devenir ses héroïnes. Elle s’est autorisée de brûler.
Face à cette solution de survie qu’utilise Aloïse, des questions essentielles s’imposent à moi de
manière instincives: Qu’espère-‐t-‐on de notre vie ? Qu’est-‐ce qui est important pour soi ? Quels sont
nos rêves à nous ? Qu’est ce qui nous empêchent de les vivre ? Qu’est-‐ce qui nous fait peur à ce
point ? Dans quel asile sommes-‐nous emfermés ? A-‐t-‐on le cran de badigeonner notre existence de
ces couleurs flamboyantes ? Voilà toutes les questions que j’aimerais mettre dans un coin de la tête
des spectateurs, en espérant qu’elles ne les lâchent pas…
ENFERMEMENT ET SOLITUDE
Il y a double enfermement dans l’histoire d’Aloïse, tout d’abord celui dans lequel la plonge sa
maladie psychique et ensuite l’enfermement concret qu’elle subit à l’Hôpital de Cery à Lausanne,
puis à l’asile de la Rosière à Gimmel pendant plus de la moitié de sa vie. Nous pouvons nous poser la
question s’il s’agit ici de containte ou de protection ? S’était-‐elle réfugiée loin de ce monde avec
lequel elle ne savait plus comment faire ? Le fait d’être enfermée loin de la société active l’apaisait-‐
elle ?
C’est une situation extrême, mais elle nous renvoie automatiquement, une fois de plus, à nos
propres existences. Derrière quoi avons nous besoin de nous barricader pour supporter les
agressions extérieures, endurer la réalité, suivre la société qui file à un rythme effréné ? Et peut-‐être
dans quoi nous enferme-‐t-‐on ou dans quoi nous sommes d’accord d’être enfermés pour faire partie
du troupeau ? Y a-‐t-‐il un équilibre à trouver entre ces contraintes et ces besoins de protection pour
être simplement soi ?
L’ETRANGETE COMME RESSOURCE
Je suis particulièrement sensible à ce thème avec ma première profession d’infirmier en psychiatrie.
Il ne s’agit pas ici de faire un plaidoyer des conditions de vie des personnes en marge de notre
société dont font souvent partie les personnes souffrant de certaines maladies psychiques.
Cependant, cela éveille tout de même la question de quelle place ont-‐ils actuellement ? Sans affirmer
que le système est entièrement injuste et dysfonctionnel. Mais comme peut nous le rappeller
l’histoire d’Aloïse Corbaz, ce sont, avant d’être des malades psychiques, des personnes qui ont vécu,
qui ont ou avaient des rêves, qui ont chacun une certaine compréhension du monde selon son
propre parcours de vie comme tout autre individu « pouvant fonctionner » dans notre société. Leur
parole, leur discours est peut-‐être moins limpide, mais ont-‐ils cependant moins à dire ? et ce qu’ils
ont à dire est-‐il moins pertinent ?
J’ai envie également d’évoquer ce que j’appellerais la poésie du quotidien, tous ces comportements,
ces gestes, ces paroles qui nous bousculent dans la rue, qui nous paraissent inappropriés, nous font
sourire ou peur, nous obligeant à trouver d’autres manières, que celles habituelles et bien
formatées, pour répondre, communiquer. La surprise d’être décontenancé même si on ne fait que
passer son chemin. C’est une poésie riche, douloureuse, drôle, magique, râpeuse, belle, qui nous
ramène sans concession et immédiatement au présent et qu’il faut savoir entendre.
L’ETERNELLE AMOUREUSE
Pourquoi donc, en évoquant votre souvenir est-‐ce que je vibre comme une cloche annonçant des
épousailles d’ange ? ….
Elle n’a jamais su bien embrasser. Elle était trop petite, n’osait pas l’embrasser… à 20 ans on est
fugitive, craintive, on n’ose pas, on se sauve…
Il ne faut pas s’embrasser quand il fait froid, on pourrait se mordre.
Aloïse
Deux histoires d’amour marquent la jeunesse d’Aloïse avant son internement, et j’ai la sensation de
les voir dans chaque tableau. Tout d’abord, une liaison clandestine avec un prêtre défroqué voisin de
la maison familiale à Lausanne, puis un amour fantasmé avec l’empereur Guillaume II qu’elle aperçut
lors de sa vie à la cour en tant que gouvernante du chapelain.
Il sera donc question d’amour, comment faire autrement… Aloïse en parle si délicatement avec une
prose magnifique et inventive; ses mots sont comme des pétales, et l’on n’arrive savoir pourquoi,
mais ces pétales vous égratignent, laissent de petites cicatrices, de minuscules entailles béantes,
comme s’il on aimait avec elle…
Les écrits d’Aloïse débordent également d’un amour plus vaste que celui de la relation amoureuse,
un amour qui espère retrouver une harmonie perdue entre les hommes, entre l’homme et le
cosmos ; un désir d’harmonie un peu utopiste et naïf me direz-‐vous, et je vous répondrai oui, mais il
est livré de manière si entière, si sincère, qu’il met du baume au cœur, je vous assure, et on a
presque envie d’y croire nous aussi !
MISE EN SCENE ET SCENOGRAPHIE
Un univers blanc quadrillé pouvant autant évoquer la feuille de papier vierge, prête pour le dessin à
venir d’Aloïse Corbaz que l’asile psychiatrique de la Rosière où elle a séjourné la moitié de sa vie. Des
formes et des guirlandes de lustres pouvant évoquer la vie de la cour de Potsdam, une salle de bal
abandonnée ou un théâtre interne.
Pas de récit biographique ou d’explication de l’œuvre picturale de la peintre, nous avons voulu ce
spectacle comme une balade dans la psyché d’Aloïse. Une succession de tableaux parlés, chantés,
musicaux, inventés à partir d’événements clés de sa vie, de son quotidien, de l’univers de ses
tableaux comme l’amour, la rencontre avec l’empereur Guillaume II, la vie rêvée de la cour, l’asile
psychiatrique, la solitude, le chant, la création artistique, la confusion de la maladie.
Au plateau trois comédiennes pouvant être tour à tour ou en même temps Aloïse, ses sœurs,
l’empereur Guillaume II, l’impératrice Victoria ou toutes les reines de ses tableaux.
Trois musiciens également, habillés des couleurs primaires pour rappeler la base de l’univers de ses
tableaux. Une création musicale originale s’amusant aussi bien autour de standards de l’opéra (une
des passions d’Aloïse) que d’une reprise de la chanson rock de PJ Harvey « Oh my lover » ou que
d’univers sonores faisant partie intégrante des différentes séquences. Les musiciens n’ont pas le
simple statut de musicien mais participe de manière active à la vie sur le plateau.
Nous avons travaillé à partir des écrits d’Aloïse (lettre au père interné, lettre à ses sœurs, lettre à
Guillaume II) et des titres rocambolesques de ses tableaux. Nous avons également écrit certaines
scènes à partir d’improvisation et du travail de plateau, écriture qui s’est réalisée à partir de la vie et
de l’œuvre de cette dernière en résonnance avec l’imaginaire de l’équipe artistique.
Une collaboration étroite a eu lieu avec des intervenants spécialistes de l’art brut et d’Aloïse Corbaz
tout au long de la création.
Une construction qui emmène la spectateur dans un univers de l’ordre de la sensation et non plus du
raisonnement, visant à mettre en exergue cette force de vie incroyable et cette urgence de vivre
contagieuse ressentie lors de ma visite de la rétrospective de son œuvre en 2012 au Palais de Rumine
et à la collection de l’art brut à Lausanne.
EQUIPE ARTISTIQUE
Mise en scène : Sébastien Ribaux
Jeu : Anne-‐Sophie Rohr-‐Cettou, Delphine Rudasigwa, Juliette Flipo
Collaboration artistique : Sophie Pasquet-‐Racine
Musique (composition et interprétation) : Benoît Moreau, Ariel Garcia, Luc Müller
Création lumière et Régie : David Baumgartner
Son : Raphaël Raccuia
Scénographie : Yangalie Kohlbrenner
Costumes : Scilla Ilardo
Administration : Stéphane Frein
Sébastien Ribaux
Né à Neuchâtel en 1976, Promotion 2005 de l’Ecole du Théâtre des Teintureries de Lausanne, école
professionnelle d’art dramatique. Il est un des membres fondateur de la Compagnie ammoniac ainsi
que de Dog Production.
A l’automne 2007, il met en scène « La Prose du Transsibérien » de Blaise Cendrars qu’il présente
notamment au Théâtre de la Bastille et au Théâtre du Chauderon à Paris. Il travaille en tant
qu’assistant à la mise en scène pour Pierre Maillet et Jean-‐François Auguste sur le spectacle « Les
Bonnes » de J. Genet (Printemps 2008 / Vevey, Lausanne, Moscou) ainsi que pour Sophie Rousseau
pour le spectacle « Quel chemin reste-‐t-‐il que celui du sang? », textes autour d’Ulriche Meinhof
(Printemps 2009 et automne 2010 / Ferme du Buisson – Paris et Rose des Vents à Lille). Il réalise la
mise en scènes de « Ophélies », spectacle autour d’écrits bruts et divers textes de théâtre, pour le
festival de la Cité à Lausanne -‐ juillet 2009. En février 2011, il met en scène au Contexte Silo de
Renens, « L’Homosexuel ou la difficulté de s’exprimer » de Copi, et au printemps 2012, « Bec et
Ongles », au Théâtre des Teintureries à Pully et au Lavoir Moderne à Paris. En juillet 2012, il co-‐met
en scène « Bizarra » de Rafael Spregelburd à L’Ecole du Théâtre des Teintureries avec la Compagnie
des Lucioles. Il met en scène au printemps 2013 « Une visite inopportune » de Copi au 2.21 à
Lausanne. En juin 2013, il crée avec Dog Production trois performances autour de la maladie
psychique d’après des groupes d’écritures et des interviews dans le centre thérapeutique de Jour de
la Fondation de Nant. En juillet de la même année, il fait la mise en scène de « Dis moi Blaise
Cendrars … » pour le projet Transvaldésia de la Fondation de l’Estrée, spectacle extérieur et
itinérant. A l’automne 2014, il participe en tant que consultant à la mise en scène aux projets « Peau
de Tambour » (H.Michaux) de la Cie Patte Blanche (La Voirie -‐ Pully et l’ABC -‐ Chaux-‐de-‐Fonds) et
« Agamemnon A mon retour du supermarché j’ai flanqué une raclé à mon fils » de R. Garcia des
compagnies Push-‐Up et le Vème Quartier au Petit Théâtre de Sion et au 2.21 à Lausanne.
Il assistera Guillaume Béguin pour sa création « Le théâtre Sauvage » au Théâtre de Vidy (janvier
2015) et Bruno Geslin pour son spectacle « Chroma » au Théâtre de l’Archipel à Perpignan (février
2015)
Parallèlement à son activité de mise en scène, il travaille en tant que comédien entre 2005 et 2011
sous la direction de Zina Balmer, Katzen haben sieben leben ou anatomie d’un détachement de jenny
Erpenbeck, Les 7 jours de Simon Labrosse, Biographie, Un jeu, Max Frisch ; G. Frigerio, La Muse en
son Jardin ; Pierre Maillet, Les 4 jumelles de Copi ; Pierre Maillet et Jean-‐François Auguste, Les
Bonnes de Jean Genet, Anarchie en Bavière de R.W Fassbinder; François Landolt, Britannicus de
Jean Racine ; Pip Simmons, Le Songe d’une nuit d’été de W. Shakespeare dans la Tour Vagabonde et
Sandro Palese, Teenfactory (d’après le journal de Kurt Cobain) au Grütli à Genève et au Romandie à
Lausanne et « Nobody dies in dreamland » au Grütli et au 2.21.
PRESSE
24 HEURES
ESPACE 2 – MATINALES
https://www.rts.ch/espace-‐2/programmes/matinales/7218747-‐les-‐matinales-‐
d-‐espace-‐2-‐du-‐16-‐11-‐2015.html#7218745
L'Atelier critique
L'actualité de la critique théâtrale en Suisse romande
Plurielle
Par Valmir Rexhepi
Autour d’Aloïse / de Sébastien Ribaux / mise en scène Sébastien Ribaux / Théâtre 2.21 / du 17 au 29
novembre 2015 /
Sébastien Ribaux nous mène à la rencontre d’Aloïse Corbaz. Mais Aloïse est multiple, insaisissable.
Alors on reste autour, pour ne pas trop la brusquer, pour qu’elle ose sa folie devant nous.
Il est de ces rencontres heureuses qui se font au hasard d’un regard. Sébastien Ribaux frôle Aloïse
Corbaz, vêtue de mots, de peintures, de dessins. Peut-‐être bien qu’elle le bouscule un peu, toute
suspendue qu’elle est sur les murs de la collection de l’Art brut, à Lausanne. Du moins, celui-‐ci va
écrire et mettre en scène une pièce autour de celle-‐là.
Ou peut-‐être faut-‐il dire celles-‐là ? Au théâtre, Aloïse est plurielle, tantôt amante, tantôt cantatrice ;
parfois reine, puis servante ; dévote, folle, solitaire esseulée entre les cloisons blanc sale d’un hôpital
psychiatrique. Elle serpente entre ses identités. Pour jouer à Aloïse, sur scène, il y aura trois
comédiennes : Juliette Flipo, Anne-‐Sophie Tohr-‐Cettou, Delphine Rudasigwa. Trois pour une, presque
une devise de mousquetaire. Bêtement, on s’attendrait à ce que chacune son tour joue à Aloïse,
révélant linéairement les différentes identités. Bêtement. C’est là que la pièce désarçonne : la
multiplicité des identités se donne dans la simultanéité des voix portées par les trois comédiennes,
sur scène.
Voici Aloïse en nuisette blanche, escarpin rouge. Elles est assises sur trois chaises, ou peut-‐être elle
sont assise sur une chaise triple. Aloïse dit avoir été Marie Stuart, décapitée. Aloïse sont choquées
par cette révélation, puis elle rajoutent qu’elle ont été reine de Navarre, Impératrice d’Autriche,
princesse violée par son fils, princesse enlevée, reine déchue. Elles est surprises par elles-‐mêmes.
Nous aussi.
Où va-‐t-‐on ? Nulle part. On reste autour. Ce sont Aloïse qui s’en vont et reviennent, sans cesse. Elles
est enfermées dans une pièce blanche dont les murs sont pourtant fendus de toutes parts. Il y a une
grosse brèche de notre côté, c’est par là qu’on regarde. On observe, on se rit un peu de cette folie,
on angoisse parfois, on ne comprend plus, rarement. Dans le fond de la pièce, un orchestre rouge
jaune bleu, joue un air voluptueux. Aloïse chante, chantent.
L'Atelier critique
L'actualité de la critique théâtrale en Suisse romande
Du dessin à la scène
Par Deborah Strebel
Autour d’Aloïse / de Sébastien Ribaux / mise en scène Sébastien Ribaux / Théâtre 2.21 / du 17 au 29
novembre 2015 /
Sébastien Ribaux présente un spectacle autour d’Aloïse Corbaz, artiste suisse emblématique de l’art
brut. Sa vie et son œuvre picturale sont évoquées avec délicatesse et poésie non pas dans une logique
linéaire mais dans un hypnotique mouvement tourbillonnant.
Aloïse Corbaz (1886-‐1964) est née à Lausanne. Une fois sa scolarité terminée, elle devient couturière.
Elle aime un prêtre défroqué. Cette passion fait scandale. Elle est alors envoyée en Allemagne. Elle
occupe ensuite un poste de gouvernante à Postdam, à la cour de Guillaume II dont elle tombe
éperdument amoureuse et avec qui elle vit une intense passion – uniquement dans son imagination.
De retour en Suisse à l’aube de la Première Guerre mondiale, elle est hospitalisée dès 1918 à Cery
puis, deux ans plus tard, elle est définitivement internée à l’asile de la Rosière, à Gimel-‐sur-‐Morges.
Jusqu’en 1936, elle dessine sur des cartons, en cachette avec ce qu’elle trouve : suc de pétale, feuille
écrasée voire pâte de dentifrice. Puis le corps médical lui fournit du vrai matériel : mine de plomb,
crayons de couleurs et craies grasses. Les thèmes du couple, de l’opéra ou encore du théâtre sont
récurrents dans son œuvre à la fois colorée et fleurie.
C’est après avoir visité la rétrospective de cette artiste Suisse à la collection de l’art brut et au musée
des Beaux-‐arts de Lausanne, en 2012, que le metteur en scène Sébastien Ribaux eu l’idée et l’envie
de créer un spectacle sur ce personnage énigmatique et attachant qu’est Aloïse Corbaz. En 2013
déjà, le dramaturge avait proposé au théâtre 2.21 trois performances autour de la maladie psychique
prenant appui sur des résultats d’ateliers d’écriture et d’interviews réalisées dans un centre
thérapeutique. Il continue d’explorer les failles de l’esprit humain avec ce divin voyage au sein de
l’univers « corbazien ».
Après avoir lu plusieurs ouvrages et étudié son œuvre, Sébastien Ribaux et ses comédiens se sont
réunis et ont commencé un travail d’improvisation. En découle non pas une pièce biographique mais
un condensé des moments importants de la vie de l’artiste. Extraits de lettres adressées à sa famille,
mashup mélangeant chansons françaises de Mike Brant à Francis Cabrel avec des airs d’opéra
comme Carmen, le vrai se fond dans l’imaginaire, l’historique se confond avec le fantasmagorique.
Trois comédiennes en nuisettes blanches incarnent tantôt Aloïse, tantôt ses sœurs. Cette polyphonie
semble faire écho à la schizophrénie dont l’artiste était atteinte. Elles sont accompagnées par un
orchestre composé de trois musiciens aux costumes et cravates respectivement rouges, bleus et
jaunes. Car il y a de la couleur dans le spectacle. Les éclairages parfois rouges, parfois jaunes
évoquent les harmonies colorées vives et chaleureuses de l’œuvre peinte d’Aloïse. Le travail pictural
de l’artiste est ainsi évoqué pour ne pas dire fidèlement transposé à la scène. Omniprésentes dans
ses dessins, les figures humaines aussi bien masculines que féminines sont caractérisées par de
grands yeux bleus sans iris. Une femme avec une robe rouge, de longs cheveux bouclés et des yeux
bleus apparaît à un moment donné discrètement ici en arrière-‐scène. Le décor, lui aussi, évoque les
dessins d’Aloïse par la forme rectangulaire intégrant des éléments courbes et par la couleur blanche
dotée d’un léger quadrillage, rappellant les feuilles quadrillées ou plus simplement le papier, support
de prédilection de l’artiste.
Le public est alors immergé dans l’œuvre d’Aloïse tout en découvrant timidement sa personnalité.
Amoureuse transie, aux relations impossibles, grande observatrice de la nature, s’émerveillant
chaque jour face à un oiseau qui s’envole, Aloïse est présentée ici comme quelqu’un de touchant. De
cette dame qui n’a cessé de peindre des princes sur des fonds roses se dégage une délicieuse
tendresse mélancolique. Spectacle monographique porté par un esthétisme fidèle à l’œuvre
picturale de l’artiste et par une remarquable poésie se dégageant aussi bien du texte que du jeu,
Autour d’Aloïse est un pur chef-‐d’œuvre non pas réservé aux seuls fervents amateurs d’art mais
adressé à tous les spectateurs prêts à se laisser transporter dans un rêve éveillé candide et
multicolore.
Captation Vidéo
Teaser : https://www.youtube.com/watch?v=Lawrw-‐x7tVE
Intégrale : https://www.youtube.com/watch?v=PQ_dRQl3J0w&feature=youtu.be
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