CONCENTRE LESBIEN AMANT JUIF ANNEXE PHOTO .pdf
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Auteur: Claire
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L’AMANT JUIF DE MA MERE PENDANT LA GUERRE
Extrait de :
Claire Sagnières, « Concentré lesbien irrésistiblement toxique », pp. 182-190.
Son amant juif…
Elle attend ses 21 ans, sa majorité légale et se barre. C’est sa version, mais à travers toutes
les petites choses dites et mises bout à bout, je crois que son départ à Paris est moins glorieux :
son amant juif l’avait demandée en mariage (quand ils dormaient ensemble, il mettait toujours
ses chaussures sur le rebord de la fenêtre dans le sens du départ, afin de se sauver plus vite si
les allemands venaient le chercher), et mon grand-père a bien sûr refusé et du coup a facilité
son départ à Paris pour la séparer de lui. Epouser un juif pendant la guerre c’était, voyez-vous,
trop dangereux, surtout quand on a la photo de Pétain à l’entrée de son entreprise de
construction...Une autre fois, plus récemment ma mère m’a même dit que son père avait eu
raison et que son amant avait été bien égoïste de lui proposer cela...En effet durant l’été 44,
qu’elle passait comme presque tous les étés avec la famille dans la maison de Tarces, elle apprit
la mort de cet amant dans un village près de La Groseille. Elle y arriva trois jours plus tard et
le vit, mort, exposé depuis tout ce temps sur un muret au soleil avec les mouches et l’odeur,
pour faire un exemple. Comment a-t-on pu vivre quelque chose comme cela et n’en plus parler
avec personne, ni avec son mari ni avec ses fils ; en parler seulement à moi sa fille de douze
ans, à qui elle montra la bague avec une grosse agate qu’elle avait reçue de lui, et qu’elle me
donna ou peut-être que je volai, et en tout cas que je perdis dans un de mes déménagements. Je
ne me souviens pas du nom de cet homme. L’ai-je jamais su ? Je savais seulement qu’il
s’occupait de postes TSF. Récemment, j’en ai parlé à ma mère, qui du fond de son Alzheimer
m’a répondu : « Tu le connais, toi ? »... puis plus rien. J‘aurais aimé connaître le nom de cet
homme, qui fut sans doute le premier amour de ma mère.
A l’automne dernier, fin 2009, en cherchant avec Google, je trouvai un article dont le titre
est : « Une semaine de la vie dans la vallée du Valbon sous l’occupation allemande. » Sachant
qu’il était mort dans le village de Valbon, je fis les démarches pour commander une copie de
cet article à la Bibliothèque Nationale de France. Deux mois plus tard, je reçus cette copie. Je
le parcourus fiévreusement. Et je trouvai mention d’un juif qui s’occupait de TSF tué par les
allemands. Il y avait son nom : Léon Kon Lejgor. Enfin je savais son nom !
Et cet été 2010, j’allai visiter les lieux. Voici ce que j’écrivis à mon cousin Eric au début
août 2010 :
« Cher Eric :
Oui, cela a été tout simple, avec beaucoup de chance. Je suis allée à la mairie de Valbon qui
venait de fermer pour midi, mais il y avait une femme de ménage qui m’a dit que si j’étais
intéressée par la période de la guerre, il suffisait d’aller frapper chez madame Buisson tout à
côté. Cette vieille dame était avec son mari en train de passer à table avec leurs petits enfants et
enfants…mais elle a été tellement intéressée par mon histoire qu’elle a commencé à parler.
Avec son mari, ils avaient dix-quinze ans quand ils ont connu Lejzor (en français Léon) Kon
qui leur avait livré un poste de radio TSF et venait chez eux le réparer…de toutes façons tout
le monde dans le village savait que des juifs étaient cachés. C’est elle qui a fabriqué la revue
que la BNF m’a envoyé en copie l’an dernier. Elle m’en a vendu un exemplaire en couleur
dédicacé. Son mari se souvenait avoir longtemps cherché derrière le poste de radio celui qui
était caché. Elle se souvenait que cet homme lui avait dit que bientôt on pourrait voir l’image
de la personne qui chante…ce qui ferait changer d’avis le public s’il était moche !
Elle fait partie du Souvenir Français qui a récemment entretenu la tombe, mais la plaque de
marbre qu’ils ont rajouté sur la tombe s’est cassée et je leur ai donné 100 euros pour qu’ils
continuent d’entretenir la tombe. Ils m’ont dit que c’était un très bel homme en pantalon de
golf. Et surtout ils m’ont donné l’adresse de Henriette Barret de Barre, épouse Fraux, qui est la
fille des gens qui cachaient Léon, dans le hameau des Angels. C’est une vieille dame avec un
cancer avancé mais elle m’a reçue volontiers. Et elle m’a dit le mot de la fin de mes recherches
en disant qu’il avait une amie, qui s’appelait Marie ou Mady (hip ! hip ! hourrah ! et mon amie
est témoin ! Cela prouve enfin que mes souvenirs, tous mes souvenirs sont vrais), qu’il avait
demandé à ses parents s’il pouvait la recevoir et qu’elle était venue, plusieurs fois, et qu’elle
avait même mangé à leur table. Elle m’a montré l’atelier où il s’occupait de ses postes TSF la
journée et il attendait le soir pour aller en haut du village dormir dans un autre endroit. Elle se
souvenait que le soir de pleine lune ils se promenaient ensemble et aussi qu’il lui faisait réviser
ses devoirs. Il est resté 2 ou 3 ans…avant il travaillait dans un magasin de postes TSF rue Thiers
à Guignan. Il y avait aussi son frère qui était réfugié. Il ne s’entendait pas bien avec lui, il venait
de Paris.
Quand les allemands sont arrivés, ils fuyaient et cherchaient un chemin par les montagnes.
Lui et les autres maquisards ont été cachés dans une grotte au bout du chemin qui longe la
montagne. Des gamins leur apportaient à manger la nuit. Ils avaient ordre de ne pas sortir tant
qu’on ne viendrait pas les chercher. Les allemands se tenaient sur la route du bas, camouflés
sous des feuillages. Un jour les gens du village ont entendu des tirs. Les allemands
criaient : « Terrorist ! Terrorist ! » et ils les ont empêchés d’aller enterrer le corps pendant
plusieurs jours (c’est exactement ce que maman m’avait raconté). Et quand ils ont pu
l’approcher il avait une grosse blessure à la tête faite par la mitraillette et qui grouillait de vers.
Ils ont dû le laver dans la rivière. Les allemands avaient aussi dégrafé son pantalon de golf pour
voir ses organes afin de vérifier qu’il était bien juif.
02 décembre 2011
Je possède maintenant le Procès Verbal établi par les gendarmes le 27 novembre 1945, où il
est noté qu’un Léon (Lezgor) Kon né à Lodz ( Pologne) le 28 Juin 1912, célibataire habitant
rue Lafayette à Guignan, ingénieur IPG (ce qui signifie « ingénieur und planungsgesellschaft »
cad ingénieur civil), né de Abraham et …(illisible) Sobol a été abattu par les allemand le 11
août 1944.
Ils ont reconstitué qu’il avait dû sortir pour boire de l’eau au canal car il y avait laissé sa
gourde et trompé par les allemands cachés dans les feuillages à 30 mètres en contrebas et
silencieux, il s’est avancé sur le chemin. Ils l’ont vu passer entre les buissons…
Ma mère est venue mais n’est pas restée pour l’enterrement, qui a eu lieu quelques jours
après… C’est le frère de cet homme qui a offert la tombe hébraïque très belle. La phrase « à
notre frère » désigne bien sa fratrie de sang et non pas de maquis. Après ils ont inscrit son nom
sur le monument aux morts comme seul mort du hameau des Angel pendant la guerre de 40 et
on a mis une plaque à l’endroit où il est mort avec inscrit dessus qu’il avait été « victime des
hordes allemandes ».
Voilà. Je crois que c’est tout. Ils cachaient des juifs, car ils avaient avant guerre un médecin
juif de Roumanie, ayant fait ses études en France, qui leur avait demandé de le cacher lui et des
autres juifs de Guignan. Léon parlait très bien le français avec juste un petit accent. Il venait de
Lodz en Pologne. Elle n’a pas de photo de lui car ce n’était pas l’habitude à l’époque de prendre
des photos des gens si facilement…Le Souvenir Français a agrafé une cocarde bleu blanc rouge
sur la tombe et sur la plaque mémoriale.
Cela me fait du bien de retrouver ainsi la trace de cet homme, qui représente pour moi une
autre victime du clan Cyment. Victime de mon grand-père, de ma mère, du béton, de la
bourgeoisie bien-pensante pétainiste, de tout ce système que je hais et dont j’ai fait mon ennemi
premier. Je suis heureuse de pouvoir citer son nom, son vrai nom dans ce livre où tous les autres
personnages sont floutés avec leur nom changé, afin que nul ne les reconnaisse. Lui seul est
entier dans ce livre qui a pour prétention de dévoiler tout ce qui a été caché par les mensonges
de cette petite bourgeoisie de province. A lui seul dont personne ne se souvient du nom, j’offre
une sépulture, avec son nom gravé sur du papier imprimé.
Le 20 août 2010, je reçois une lettre de la fille de ceux qui l’avaient caché pendant la guerre.
Bansaï ! Elle a trouvé une photo de Léon Kon et me l’envoie. Depuis hier j’ai donc, exposé
devant mon imprimante la photo de cet homme, fantôme de la jeunesse de ma mère. Et cela me
remue aux tripes. Car il est très beau et ressemble à Gérard Philipe, avec ses oreilles décollées,
ses cheveux noirs et drus, et son visage intelligent. Je l’avais gardé en moi si longtemps, ce
secret de ma mère, que je suis intimidée qu’il paraisse ainsi au grand jour. Avec la forêt en
arrière plan et des fleurs dans ses mains.
Un dernier détail, alors que mon petit frère a pour prénom celui de l’amant écossais de ma
mère, c’est-à-dire Patrick, s’il avait été une fille, il se serait appelé Myriam, prénom juif. Elle
avait ainsi le projet de faire adopter par toute la famille, à son insu, un prénom qui lui rappelait
cet amant juif qu’elle lui a toujours caché.






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