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Université de Perpignan Via Domitia
Master 1 BIMoPoDD
Spécialité professionnelle "Biodiversité et Développement Durable"

CARTOGRAPHIE DES SITES D’HIVERNAGE DU GRAND TETRAS (TETRAO
UROGALLUS) ET EVALUATION DU DERANGEMENT SUR LE SECTEUR DE
MOSCALLÓ (Réserve naturelle de Py, Pyrénées-Orientales)

Elisa GREGOIRE

Photo : Elisa GREGOIRE

2011-2012
Sous la direction de : Claude GUISSET
Réserve naturelle nationale de Py

REMERCIEMMENTS

Comment mettre un point final à ce rapport sans remercier tout ceux et celles avec qui j'ai
partagé ces trois derniers mois ? Claude et Raúl d'abord, qui m'ont permis de venir arpenter la
superbe réserve de Py et m'ont accueilli avec tant de gentillesse. Jérémy, fraîchement arrivé, avec
qui j'ai eu le plaisir de découvrir la face caché du centre des Isards. Sylvain, qui a grandement
participé à cette découverte en nous proposant une foule de jeux plus ludiques les uns que les
autres (visite du « grenier aux mouches », descente d'escalier sur des cartons vides, lancer de lits
du haut du troisième étage, cours de karaté « brise-meubles », et j'en passe). Carme pour sa
bonne humeur et ses supers calçots (merci Raúl également !), Chloé pour tous les moments
sympas passer à papoter de tout et de rien (et pour ta super cuisine !). Merci à vous tous qui
faites vivre ce lieu par votre dynamisme et votre bienveillance. Mon stage a largement dépassé
l'expérience professionnelle, ce fut une véritable aventure humaine. J'ai eu l'immense plaisir de
rencontrer des gens extraordinaires avec qui j'ai pu partager des moments très riches en émotions
que je n'oublierai pas de sitôt.
Merci à ceux qui m'ont aidé à rédiger ce rapport. Spécialement à Raúl pour les
statistiques, le SIG et bien d'autres choses. Et biens sûr à Claude et Jérémy pour leurs conseils et
leur relecture, ainsi qu'à Claude Novoa pour ses lumières. Enfin à Alain, pour sa disponibilité, sa
bonne humeur et son aide précieuse sur le terrain, ainsi qu'à Bruno qui nous as accompagné dans
les dernières prospections.
Quelques remerciements un peu spéciaux à ceux qui m'ont tenu compagnie dans la
fraîcheur du centre : merci à William et à Arthur le fantôme (celui qui laisse les lumières
allumées).
Merci enfin aux copains de Perpi (ainsi qu'à Laura et Jérémy bien sûr) avec qui même en
soirée on ne peut s’empêcher de parler boulot. Et merci à Kévin d'être là, simplement.

(Sylvain, j'espère de tout cœur que tu réussira à faire décoller ton vaisseau spatial pour l'amener
sur ta propre planète, les histoires y sont bien plus jolies)

Sommaire

PARTIE I – CONTEXTE DE L’ETUDE..................................................................................................... 1
1. La Réserve naturelle nationale de Py ............................................................................................... 1

2.

1.1.

Historique et contexte socio-économique ................................................................................. 1

1.2.

Limites administratives............................................................................................................. 2

1.3.

Enjeux actuels ........................................................................................................................... 2

Le grand tétras au cœur des enjeux de conservation ........................................................................ 2
2.1.

Description de l’espèce ............................................................................................................. 2

2.2.

Statuts et état des populations pyrénéennes .............................................................................. 5

2.3.

Le grand tétras dans la réserve naturelle de Py......................................................................... 7

PARTIE II - CARTOGRAPHIE DES SITES D’HIVERNAGE ................................................................. 9
1. Etat des connaissances : cartographie des sites d’hivernage en 2001............................................... 9
2.

3.

4.

Matériel et Méthodes ........................................................................................................................ 9
2.1.

Protocole d’étude ...................................................................................................................... 9

2.2.

Méthodes d’analyses............................................................................................................... 11

Cartographie des sites d’hivernage : secteur de Moscalló .............................................................. 11
3.1.

Répartition des indices de présence durant l’hiver 2012 ........................................................ 11

3.2.

Répartition des indices de mâle et de femelle ........................................................................ 11

3.3.

Comparaison avec les résultats des prospections de 1998 à 2001 .......................................... 12

Discussion....................................................................................................................................... 13
4.1.

Répartition des indices et des crottiers en 2012...................................................................... 13

4.2. Comparaison des sites des résultats des prospections de 1998 à 2001 et des résultats de
l’année 2012 ....................................................................................................................................... 14
5.

Conclusion ...................................................................................................................................... 15

PARTIE III – EVALUATION DU DERANGEMENT SUR LE SECTEUR DE MOSCALLÓ............... 16
1. Le grand tétras : une espèce sensible .............................................................................................. 16
2.

Enquête sur les pratiques de loisirs au col de Mantet ..................................................................... 17
2.1.

Mise en place et objectif de l’enquête .................................................................................... 17

2.2.

Fiche questionnaire et méthode d’analyse .............................................................................. 17

2.3.

Résultats ................................................................................................................................. 18

2.4.

Discussion............................................................................................................................... 19

2.5.

Conclusion .............................................................................................................................. 20

PARTIE IV – PROPOSITION DE GESTION........................................................................................... 21
1. Sensibilisation et information des utilisateurs ................................................................................ 21
2.

Définition de zones de quiétude ..................................................................................................... 21

3.

Actions entreprises sur le massif .................................................................................................... 23

GLOSSAIRE .............................................................................................................................................. 23
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................................... 24

PARTIE I – CONTEXTE DE L’ETUDE
1. La Réserve naturelle nationale de Py
1.1.

Historique et contexte socio-économique

Le département des Pyrénées-Orientales compte à ce jour 11 réserves naturelles qui protègent près
de 4,1% du territoire. La naissance de ces réserves découle du projet initial de création d’un parc
naturel dans le département proposé dans les années 70 par l’association Charles Flahault. Ce projet
n’ayant pas été accepté par toutes les communes, il fut proposé de créer plusieurs réserves
naturelles. La réserve naturelle de Py a ainsi vu le jour par décret ministériel le 17 Septembre 1984,
et est classée réserve naturelle nationale depuis le 27 Février 2002. Avec une superficie de 3 930 ha,
elle représente 79% du territoire de la commune de Py. Le territoire appartient en quasi-totalité à la
Société Civile Forestière de l’Ecureuil de Py et de Rotjà (SCFEPR) qui a cessé toute exploitation
forestière sur son domaine depuis 2003. La gestion de la réserve a dans un premier temps été
assurée par la commune de Py, puis par l’Association gestionnaire de la réserve naturelle de Py, et
actuellement par la Fédération des Réserves Naturelles Catalanes (FRNC).
Le territoire de la réserve accueille une importante diversité d’activités humaines. Il ne subsiste de
l’agriculture vivrière du siècle précédent que des vestiges qui marquent encore le paysage et
constituent un patrimoine culturel (terrasses, cortals). Les terrains pastoraux subsistent mais ne
représentent plus que 40 % de la surface de la réserve (79% en 1826).
Au cours du siècle dernier, la surface de la forêt a considérablement augmenté. L’exploitation
forestière est présente à Py depuis plusieurs siècles. Après des crues importantes en 1940, une partie
de la forêt a été classée en forêt de protection en 1953. La SCF de l’Ecureuil a acquis la quasitotalité du territoire de la commune de Py dans les années 1980. Un plan simple de gestion
forestière prévu pour les années 1996 à 2015 a été partiellement appliqué jusqu’en 2003 mais
l’incompatibilité des modes d’exploitation avec les contraintes du relief et du classement en réserve
naturelle ont conduit la SCFEPR à renoncer à toute exploitation forestière, laissant ainsi l’ensemble
du massif forestier en évolution naturelle.
La chasse est autorisée sur le territoire de la réserve. La majorité des territoires est gérée par
l’ACCA de Py, tandis que la SCF de l’Ecureuil se réserve l’exclusivité sur certains secteurs. Une
réserve de chasse et de faune sauvage a également été constituée. Pour la pêche de la truite fario
(Salmo trutta - seule espèce présente dans les cours d’eau de la réserve), la période est restreinte de
la mi-mars jusqu’à la mi-septembre. La réserve attire également un certain nombre de personnes qui
viennent pratiquer la randonnée sous toutes ses formes : pédestre, équestre, en VTT, ainsi qu’en
1

raquettes à neige ou en ski de randonnée en hiver. Le col de Mantet accueille chaque année
plusieurs milliers de personnes venues profiter du paysage et du territoire. On note également des
pics de fréquentation lors des périodes de cueillettes de champignons, de coscoll (Molopospermum
peloponnesiacum) et de fruits sauvages (framboises, myrtilles et groseilles) ; activités
traditionnelles tolérées par les différents propriétaires et prévues dans le décret de création de la RN.
1.2.

Limites administratives

Le territoire de la réserve naturelle est inclus dans la ZNIEFF de type II « massif du Canigó ». Il
représente également une ZPS à l’intérieur de la ZICO des massifs du Canigó de la Carança. La
réserve est enfin incluse dans le site Natura 2000 du massif du Canigou, ainsi que dans le périmètre
du Parc naturel régional des Pyrénées catalanes (ANNEXES 1 et 2).
1.3.

Enjeux actuels

Certains milieux particulièrement sensibles bénéficient de toute l’attention des gestionnaires. C’est
par exemple le cas des zones humides ou rocheuses. La dynamique actuelle de la végétation pose
aussi la question de la disparition des milieux ouverts, dont la préservation est devenue un enjeux
fort au cours de ces dernières décennies.
Parmi les taxons remarquables présents dans la réserve, on retrouve les trois espèces de galliformes
de montagne présents dans le massif pyrénéen : le grand tétras, le lagopède alpin et la perdrix grise
de montagne. Notons que la conservation des galliformes de montagne est une priorité dans toutes
les réserves du massif du Canigou, et de manière plus générale dans la plupart de leurs zones de
présence.
2. Le grand tétras au cœur des enjeux de conservation
2.1.

Description de l’espèce

 Éléments de systématique
Classe : Oiseaux
Ordre: Galliformes
Famille : Tétraonidés
Genre espèce : Tetrao urogallus
L’ordre des Galliformes est représenté en France par deux familles : les tétraonidés

et les

phasianidés. Les galliformes de montagnes (Fig. 1) sont des oiseaux terrestres adaptés aux milieux
froids et enneigés. Ainsi, chez les Tétraonidés, les pattes sont recouvertes de plumes, et les plumes
2

du corps sont doublés chez le grand tétras (Tetrao urogallus) et le tétras lyre (Tetrao tetrix) (LPO,
2009 ; Baïsset et al., 2006).

Fig. 1 - Les galliformes de montagne. De gauche à droite : tétras lyre (Tetrao tetrix), gélinotte des bois (Bonasa
bonasia), perdrix bartavelle (Alectoris graeca), lagopède alpin (Lagopus mutus), grand tétras (Tetrao urogallus),
perdrix grise de montagne (Perdix perdrix).
Crédits photographiques : 1 – 4 : cf Baïsset et al. 2006, 5 : Elisa Grégoire ; 6 : chassepassion.net

Le grand tétras est le plus gros galliforme présent en France (Ménoni, 2001). Son aire de
distribution apparaît très étendue dans le Nord de l’Eurasie, sur près de 11 000 km (Ménoni, 1994).
En Europe de l’Ouest, on le trouve dans les Alpes, les Pyrénées, les Vosges et le Jura ainsi qu’au
Nord du Royaume-Uni (Duriez et al., 2007).
Douze sous-espèces, décrites à partir de critères morphologiques ont été répertoriées par Duriez et
al. (2007). Mais il apparaît que seules trois sous-espèces sont valables d’un point de vue génétique :
-

Tetrao urogallus cantabricus, présente dans les monts Cantabrique (Espagne),

-

Tetrao urogallus aquitanus, inféodée au massif pyrénéen,

-

Tetrao urogallus urogallus, présente sur tout le reste de l’aire de répartition.

 Morphologie et dimorphisme sexuel
Le dimorphisme sexuel est particulièrement marqué chez cet oiseau (Wawrzyniak, 1988 ; Duriez et
Ménoni, 2008). La sous-espèce aquitanus est la plus petite : les coqs mesurent entre 81 et 94 cm
pour un poids de 2,6 à 4,2 kg ; et les poules entre 58 et 62 cm pour 1,2 à 2,0 kg (Duriez et Ménoni,
2008).
Chez cet oiseau d’origine nordique, le plumage représente 10% du poids total. Ses narines sont
également recouvertes de fines plumes qui protègent les voies respiratoires du froid, et ses pattes
3

sont entièrement plumées. Des barbules se développent sur
les doigts à l’automne, augmentant ainsi leur surface pour
faciliter la locomotion sur un sol enneigé (Alfonso Jordana
et al., 2010).
Fig. 2 - Grand tétras Tetrao urogallus, femelle et mâle. Crédit
photographique : Bernard Bellon

 Biologie et écologie de la sous-espèce pyrénéenne (Tetrao urogallus aquitanus)
Dans l’Europe de l’Ouest, le grand tétras se retrouve préférentiellement dans les vieilles forêts
d’altitude relativement ouvertes (Regnaut, 2004). Dans les Pyrénées, il utilise des habitats très
diversifiés : hêtraies, sapinières, hêtraies-sapinières, pineraies à pins à crochet (Pinus uncinata) ou à
pins sylvestres (Pinus sylvestris), chênaies à chênes sessiles (Quercus petrae). On le trouve
généralement dans des forêts au couvert assez clair pour qu’une végétation de sous-bois s’y
développe (Ménoni et al., 2004a). Sur le massif pyrénéen, il vit entre 900 et 2400 m d’altitude
(Ménoni et al., 2004a ; Duriez et Ménoni, 2008). Le grand tétras se déplace essentiellement au sol
mais reste capable de voler sur d’assez grandes distances. Un adulte peut ainsi explorer un domaine
vital de l’ordre de 200 ha sur l’année, mais les jeunes peuvent vagabonder sur plusieurs kilomètres
autour de leur lieu de naissance (PNR des Pyrénées catalanes, 2007).
Les exigences du grand tétras en termes d’habitat varient au cours de son cycle de vie et sont
particulièrement marquées lors des deux périodes critiques : l’hivernage et l’élevage des nichées.
De novembre à avril, les déplacements sont très limités et l’alimentation est composée presque
exclusivement d’aiguilles de conifères. Il recherche alors des peuplements clairs comportant au
moins quelques pins ou sapins (Duriez et Ménoni, 2008). Il affectionne particulièrement les arbres
aux branches nombreuses qui peuvent lui servir de perchoirs (Alfonso Jordana et al., 2010). A la fin
de l’hiver, le régime alimentaire du tétras se diversifie pour pallier les besoins croissants d’énergie.
Il consomme alors des aliments plus riches en protéines : bourgeons de hêtre (Fagus sylvatica), de
sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia) et de myrtille (Vaccinium sp) ; chatons de saule (Salix sp)
et de bouleaux (Betula sp) ; pousses de plantes herbacées (Duriez et Ménoni, 2008). Au printemps,
les poules élèvent leurs jeunes sur les parties très ouvertes des forêts ou les landes alentours. La
végétation y est généralement basse (entre 25 et 80 cm), et composée de nombreuses éricacées
(rhododendrons (Rhododendron sp), raisin d’ours (Arctostaphylos uva-ursi), bruyère (Erica sp),
callunes (Calluna vulgaris), myrtilles, airelles (Vaccinium sp), ect…) dont se nourrissent les
oiseaux. Les milieux sélectionnés doivent être riches en insectes, les jeunes se nourrissant
4

exclusivement d’arthropodes durant le premier mois de leur vie (Ménoni et al., 2004a ; Duriez et
Ménoni, 2008). A l’automne, les oiseaux retournent dans les sous-bois et profitent des derniers
fruits (myrtilles, framboises, raisins d’ours et fraises) avant l’hiver (Alfonso Jordana et al., 2010).
Chez cette espèce polygame, la reproduction débute autour d’avril-mai en fonction des conditions
climatiques et de l’altitude (LPO, 2009). Les mâles, qui ne se reproduisent qu’à partir de 2 à 4 ans,
arrivent les premiers sur les places de chants (aussi appelées leks ou arènes). Ils vont parader et
chanter afin de s’attirer les faveurs des femelles, qui peuvent se reproduire dès la première année
(Duriez et Ménoni, 2008). Les mâles sont territoriaux et défendent un micro-territoire au sein de la
place de chant. Généralement, la reproduction est assurée par un ou deux vieux mâles expérimentés
(Duriez et Ménoni, 2008). La ponte comporte généralement entre 6 et 9 œufs, mais peut atteindre
12 œufs. Cependant, la plupart seront prédatés et on obtient un indice de reproduction excédant
rarement 1 jeune par poule (Alfonso Jordana et al., 2010). L’espèce a une longévité importante,
surtout chez les mâles (jusqu’à 10 ans dans certains cas observés).
2.2.

Statuts et état des populations pyrénéennes

 Statuts
Le grand tétras est classé dans la catégorie « préoccupation mineure » selon la liste rouge des
espèces menacées de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN 2009) en
raison de sa large distribution mondiale. Au niveau européen, il est classé en déclin mais ne
représente pas une espèce dont la conservation est prioritaire (LPO, 2009). Cependant, en France
l’espèce est classée vulnérable et donc exposée à un risque d’extinction non négligeable. Il est à
noter que la sous-espèce aquitanus est « vulnérable » en France, alors que la sous espèce urogallus
est classée « en danger » (LPO, 2009).
 État des populations pyrénéennes
Il est très difficile d’estimer les effectifs d’une population de grand tétras, notamment sur le massif
pyrénéen où l’espèce est présente sur de grandes superficies et dans des situations écologiques très
diverses (Ménoni, 1994). On estimait en 2005 un total de 2.571-2.582 coqs adultes sur le massif
pyrénéen (français et espagnol) (Alfonso Jordana et al., 2010). Ces estimations se font à partir des
comptages de mâles chanteurs effectués au printemps sur les places de chant. Quelques synthèses
ont été publiées afin d’estimer la tendance des effectifs sur une période donnée.

5

- Années 60 à 90 : Les spécialistes notent un déclin des effectifs globaux depuis 1960, allant
jusqu’à une diminution de 60% selon Catusse et al. (1992). Selon Ménoni (1994), le déclin est
certain mais pourrait être moins important.
- Années 90 à 2010 : Ménoni et al. (2004b) notent une diminution des effectifs de mâles
chanteurs sur l’ensemble de la chaîne pyrénéenne, notamment depuis les années 1990. En effet, sur
les 61 places de chants utilisées pour estimer la tendance des effectifs (plus de 6 années de suivi des
mâles chanteurs sur ces places), 44% présentent des effectifs en diminution. 49% présentent des
effectifs stables, et 7% sont en augmentation. Il explique ce déclin par l’érosion du succès de la
reproduction au cours des années. Ménoni et Duriez (2008) notent tout de même une tendance à la
reprise numérique des populations depuis 2003 qui serait due à des années de meilleurs succès de
reproduction couplés à la mise en place de mesures conservatoires. Concernant le site du Parc
naturel régional des Pyrénées catalanes, entre 1992 et 2006, sur 20 places de chants étudiées, 4 ont
montré des effectifs significativement en baisse, 2 des effectifs en hausse et les autres étaient
considérées comme stables. Ces résultats ne permettaient pas de conclure à une diminution
significative des effectifs de grand tétras dans les Pyrénées catalanes (PNR des Pyrénées catalanes,
2007), néanmoins les populations restent fragiles.
- 2008 : Nouveau protocole d’échantillonnage et de suivi de la population de grand tétras.
L’Observatoire des Galliformes de Montagne (OGM) a produit en 2008 un nouveau protocole qui
permettra le suivi de l’évolution des populations pyrénéennes de grand tétras. Ce protocole, mis en
place depuis 2010, devrait apporter des résultats plus précis que les précédents diagnostics évoqués,
en incluant notamment des prospections sur de nouveaux sites (où aucune place de chant n’est
connue à ce jour, mais où les conditions sont favorables au grand tétras). Ce protocole prometteur
permettra d’affiner les estimations d’effectif de grand tétras sur les 10 années à venir.
Dans son bilan démographique, l’OGM (2010) fait état d’une forte diminution des effectifs de
grand tétras à l’échelle des Pyrénées. Dans l’étude du PNR des Pyrénées catalanes (2007), Claude
Novoa (ONCFS) évoque un constat plutôt pessimiste pour l’espèce dans les Pyrénées catalanes
comme le révèle l’érosion du nombre de mâles chanteurs sur les places de chant ainsi que la
prédominance des places à faibles effectifs. La situation de l’espèce est préoccupante et au cœur des
enjeux actuels de conservation de la biodiversité.
 Menaces et facteurs limitants des populations
Ménoni (1994) liste les principales menaces pour les populations de grand tétras. Il évoque tout
d’abord le morcellement des habitats qui conduit à la fragmentation des populations et augmente
6

ainsi les probabilités d’extinction de l’espèce. La dégradation et la modification des habitats sont
également considérées comme des facteurs majeurs du déclin (Ménoni et Duriez, 2008). La
fermeture du milieu et la destruction des strates basses indispensables aux nichées, ainsi que la
création de routes ou pistes forestières sont particulièrement mises en cause. Le climat, et
notamment les précipitations, semble aussi avoir un rôle dans le succès de reproduction du grand
tétras (Ménoni, 1994 ; Moss et al., 2001). L’espèce est également exposée à de nombreux
prédateurs (Fig. 3) et la prédation sur les nids serait un facteur limitant du succès de reproduction
(Ménoni, 1994).
La martre (Martes martes) et le renard (Vulpes vulpes) sont les principaux ennemis naturels des
nichées (Ménoni et Duriez, 2008). On trouve
également le sanglier (Sus scrofa), l’autour des
palombes

(Accipiter

gentilis),

l’épervier

(Accipiter nisus) ou encore l’aigle royal (Aquila
chrysaetos) (LPO, 2009).

Fig. 3 - Causes de mortalité de grands tétras Tetrao
urogallus trouvés morts dans les Pyrénées centrales et
orientales entre 1979 et 2006 (n = 192, tous âges et sexes
confondus) (Ménoni et Duriez, 2008).

Notons toutefois que les activités humaines et les infrastructures peuvent avoir un impact très fort
sur les populations de grand tétras. Elles sont en effet à l’origine des principales menaces sur le
grand tétras, à savoir la fragmentation et la destruction des habitats. Outre les effets directs liés à la
perturbation des oiseaux par les activités humaines (stress, dépense d’énergie pour la fuite), un
dérangement excessif rendrait également les oiseaux plus vulnérables aux prédateurs (Ménoni et
Corti, 2000) ainsi qu’au parasitisme (Ménoni, 2001).
2.3.

Le grand tétras dans la réserve naturelle de Py

La réserve naturelle de Py abrite un noyau remarquable de grand tétras. Quatre places de chants y
sont connues et régulièrement suivies. Deux d’entre elles sont actives avec des effectifs qui varient
de 7 à 19 coqs chanteurs depuis 1997 pour l’une, et l’autre qui compte de 2 à 8 coqs chanteurs. Les
deux autres sont moins importantes, et suivies de manière moins régulière (Fig. 4).

7

Pour les 12 dernières années, Guisset et al. (2011) notent une tendance à la baisse des effectifs de
mâles chanteurs sur l’ensemble de la

20

réserve. Ils soulignent cependant que les

15

effectifs semblent se stabiliser depuis 2004
10

entre 11 et 15 coqs. La population reste
5

faible et fragile, et la conservation du grand

0
97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11

tétras est donc une préoccupation majeure
pour la réserve.

Fig. 4 – Evolution du nombre de mâles chanteurs sur les places de chant de la réserve de Py. Source : OGM, 2011.

Mettre en place des actions de conservation adaptées nécessite d’avoir une connaissance précise du
milieu, de l’espèce et du contexte socio-économique du site. De plus, elles doivent s’adapter à la
phénologie de l’espèce et notamment considérer ses périodes sensibles. L’hiver est une période
difficile pour la faune de manière générale, et particulièrement pour le grand tétras. Lors de cette
période, la fuite face à un prédateur potentiel représente une perte d’énergie considérable et un
dérangement répété peut s’avérer fatal pour l’oiseau. Devant le développement du tourisme hivernal
et les difficultés du grand tétras à supporter le contact répété avec l’homme, il semble primordial de
connaître la répartition spatiale de l’espèce en hiver afin de mettre en place des mesures de gestion
adaptées sur les sites occupés.
Cette étude présente la réactualisation de la cartographie des sites d’hivernages dans le secteur de
Moscalló (réserve naturelle nationale de Py). Les résultats ont été analysés au regard de la
cartographie établie en 2000 afin de constater l’évolution des sites d’hivernage. Le secteur de
Moscalló présente également la particularité d’être situé à proximité du col de Mantet, lieu de
départ de plusieurs randonnées très apprécié du public (ANNEXE 3). Un questionnaire est à
disposition du public depuis 2000 afin de récolter des informations sur le public fréquentant le col
ainsi que ses pratiques. Les questionnaires correspondant à la période d’hivernage du tétras ont été
dépouillés et analysés afin d’évaluer et de quantifier le dérangement potentiel sur le secteur de
Moscalló. Enfin, des solutions de gestion seront proposées et discutées en regard des résultats
obtenus.

8

PARTIE II - CARTOGRAPHIE DES SITES D’HIVERNAGE
1. Etat des connaissances : cartographie des sites d’hivernage en 2001
Une cartographie a été établie par la réserve naturelle de Py en 2001 suite à 4 hivers de
prospection de 1998 à 2001. Douze sites d’hivernages ont été délimités au sein de la réserve, dans 4
secteurs principaux. Le secteur de Moscalló possédait la plus importante zone d’hivernage, les
individus s’y répartissant dans les domaines favorables, sans grande considération de l’exposition
du versant (Covato, 1999). 353 indices ont été trouvés, à partir de 1800m jusqu’à 2230m d’altitude
(ANNEXE 3 – CALQUE 2).

2. Matériel et Méthodes
2.1.
-

Protocole d’étude

Zone d’étude : les prospections sont effectuées dans les zones potentiellement favorables à

l’hivernage du grand tétras définies à dire d’expert : forêts comprenant obligatoirement des pins ou
des sapins, comprises entre 1800 m (1700m dans certains secteurs) et 2300m d’altitude. Les milieux
doivent être assez ouverts pour permettre un déplacement au sol et/ou un envol rapide si l’oiseau est
dérangé par un prédateur potentiel. Les secteurs à prospecter sont établis à l’avance sur les bases de
la cartographie des sites d’hivernage produite en 2001 mais peuvent être modifiés sur le terrain en
fonction de différents paramètres. A Moscalló, tous les secteurs n’ont pas pu être prospectés cette
année. La limite basse oscille entre 1840 et 1900m selon les zones.
-

Période d’étude : les relevés s’effectuent entre le 15 janvier et le 15 avril. Les prospections

se font au moins trois jours après les dernières chutes de neige afin de laisser aux animaux le temps
de laisser assez d’indices de présence sur la neige fraîche. Les résultats présentés ici correspondent
aux 7 journées de prospections effectuées dans la période du 22 février au 10 avril. Le nombre de
sortie a été limité par les contraintes climatologiques (les sorties se font idéalement lorsque le sol est
recouvert de neige) et humaines (personnel disponible).
-

Méthode : la prospection se fait par équipe de 2 à 5 personnes se déplaçant à pied ou en

raquettes. La progression se fait en courbes de niveau, l’espacement entre deux personnes
correspondant à 10 m de dénivelé (5 m en cas de faible pente, de façon à toujours garder un contact
visuel) (Fig. 5). Cet espacement permet de prospecter des surfaces assez importantes en un temps
raisonnable, en limitant la probabilité de ne pas voir un indice. Un grand tétras dérangé s’envolant
toujours dans le sens de la pente, la prospection se fait de bas en haut afin de ne pas contacter deux
fois le même oiseau. De plus, les personnes les plus basses se placent en retrait pour pouvoir
9

observer et identifier les oiseaux qui s’envolent. Les indices de présence (Tb I) de grand tétras sont
relevés et pointés sur GPS. La précision des GPS varie légèrement entre les modèles utilisés mais
reste assez bonne : précision minimale de 10 m.

Fig. 5 – Exemple des tracés des observateurs lors de la prospection d’un versant.
Tb. I – Indices de présence relevés lors de la prospection
Indices

Informations relevées

Indicateurs

Position GPS

Sexe





Crottes éparses





Ø des crottes : 10 à 12 mm

Ø : 8 à 9 mm

Crottiers





Ø des crottes : 10 à 12 mm

Ø des crottes : 8 à 9 mm

Voie dans la neige





Longueur empreinte : 12,5cm

Longueur empreinte : 9,5cm

Envol d'un oiseau





Plumes
Traces de rémiges au
sol





Aiguilles consommées





- Cartographie sous logiciel SIG : les données récoltées par GPS sont transférées sous un
logiciel de SIG pour être analysées (sous MapInfo et Quantum GIS). Pour chaque point
géoréférencé on attribue les métadonnées suivantes : l’identifiant (numéro de ligne dans la table), la
nature de l’indice, le sexe de l’oiseau, des remarques éventuelles sur l’indice, la date, le ou les
observateur(s) et les conditions météorologiques le jour de la prospection. Les secteurs de
prospection sont également dessinés à partir des tracés des observateurs enregistrés sur le terrain.
Plusieurs cartographies ont été réalisées. Une première fait apparaître les secteurs de prospection de
l’hiver 2012. Une seconde montre les indices récoltés sur ses secteurs, tous types confondus. Enfin,
les crottiers (amas de crottes situés sous des arbres) ont été représentés à part sur une dernière carte.
A la différence des crottes éparses évacuées lorsque l’oiseau est au sol et uniquement dans la
10

journée, les crottiers sont produits le jour ou la nuit lorsque l’oiseau est perché ou qu’il se nourrit
sur un arbre (Thiel et al., 2011). L’emplacement des crottiers permet donc de repérer les perchoirs
où les individus passent le plus clair de leur temps.
2.2.

Méthodes d’analyses

- Traitement des données et analyses statistiques : Différentes analyses statistiques ont été
réalisées sur les jeux de données grâce au logiciel R. Un traitement spécifique a été appliqué afin de
tester la distribution des indices de présence du grand tétras sur les sites. Une grille de 100 m par
100 m a été réalisée sous SIG, puis le nombre d’indices dans chaque case de la grille a été compté.
Cette manipulation a été réalisée sur les données de 2012 et sur les données de 1998-2001 afin de
comparer la distribution des indices sur la grille (cf. partie 4.2).
- Autres cartographies utilisées : Une cartographie des voies humaines a également été réalisée afin
de repérer les itinéraires hors-piste. Il s’agissait lors des différents passages sur le terrain de noter ou
de suivre les voies humaines (ANNEXE 3 – CALQUE 5). Les données étaient ensuite transférées
sous un logiciel SIG. La cartographie des tires forestières du secteur de Moscalló établie par le
personnel de la réserve de Py a aussi été utilisée lors de cette étude (ANNEXE 3 – CALQUE 5).
- Analyses des données météorologiques : Une comparaison des conditions météorologiques des
différents hivers de prospection a été réalisée sur les périodes de novembre à avril. Les données de
température journalière de la station située à Mantet (1550m d’altitude) ont été utilisées. C’est en
effet la station la plus proche du secteur de Moscalló.
3. Cartographie des sites d’hivernage : secteur de Moscalló
3.1.

Répartition des indices de présence durant l’hiver 2012

355 indices ont été relevés sur les secteurs de prospection présentés en annexe (ANNEXE 3 –
CALQUE 1 et 3). Ils se répartissent entre 1857m et 2211m d’altitude. 7 oiseaux ont été levés (5
mâles et 2 femelles). Les trois types d’indices les plus abondants sont les crottes éparses (50%), les
crottiers (23%) et les voies dans la neige (21%). Peu d’indices ont été trouvés sous la piste des
Belges et 80% des données se trouvent au dessus de 2000m d’altitude.
3.2.

Répartition des indices de mâle et de femelle

Pour les indices de types crottes, crottiers, traces et plumes ou lorsque l’oiseau a été vu, le sexe des
individus a été si possible déterminé. Le nombre d’indices par tranches d’altitude de 50m a ensuite
été calculé pour les mâles et pour les femelles. Les résultats sont présentés ci-dessous.
11

35
30

F

M

25
20
15
10
5
0
1850-1899

1900-1949

1950-1999

2000-2049

2050-2099

2100-2149

2150-2199

2200-2249

Fig. 6 – Proportion d’indices de grand tétras mâle (en rouge) et femelle (en bleu) rencontrée dans chaque tranche
altitudinale de 50m.

La distribution des indices selon l’altitude a été comparée chez les mâles et chez les femelles. Un
test de Wilcoxon ne montre pas de différences significatives entre les indices de coqs et ceux de
poules (p=0,096, W=1,06.104). Néanmoins, sur la figure 6, les femelles semblent être plus présentes
que les mâles dans les zones les plus basses (jusqu’à 2000m d’altitude). On trouve en effet en
dessous de 2000m près d’un quart (24%) des indices de poules contre seulement 14% des indices de
coqs. Notons que les poules somme les coqs sont présents à toutes les strates altitudinales.
3.3.

Comparaison avec les résultats des prospections de 1998 à 2001

 Altitudes moyennes des indices
Pour l’hiver 2012, l’altitude moyenne des indices de présence est de 2068m (ET=72). Lors de la
période de prospection 1998-2001, elle apparaît plus basse (moy=2008m, ET=103). Mais tous les
secteurs prospectés ces années là n’ont pas pu l’être en 2012. Une correction a donc été apportée en
ne considérant que les indices contenus dans les secteurs de prospection de l’hiver 2012. L’altitude
moyenne pour les prospections de 1998-2001 est alors de 2001m (ET=87). Un test de Student
montre que les altitudes moyenne des indices sont significativement différentes sur les deux
périodes (p < 2,2.10-16, t = -8,97). En 2012, on rencontre donc les oiseaux plus haut qu’il y a 10
ans.
 Dispersion des indices
Le nombre d’indices rencontrés dans des mailles de 100x100m a été calculé pour les deux périodes
de prospection. La distribution des indices dans ces mailles a ensuite été testée par un test de
Wilcoxon. Elle apparaît significativement différente pour les deux périodes (p=0,0302, W =
12

4,51.105). En 10 ans, la dispersion des indices a évolué : on est passé d’une distribution plutôt
éparse à une distribution plus agrégée en 2012.
 Analyses des données météorologiques
Les températures journalières ont été comparées pour les mois de novembre à mars des 4 saisons de
prospection : 1998-1999, 1999-2000, 2000-2001 et 2011-2012. Des tests de Wilcoxon ont été
réalisés afin de déterminer si les températures en 2012 étaient significativement différentes des
températures des années précédentes. Seul le mois de février 2012 est significativement plus froid
que les mois de février 1998, 1999, 2000 et 2001 (respectivement : p = 2,9910-6, W = 677 ; p =
0,0397, W = 518 ; p = 2,74.10-6, W = 679 ; p = 0,00317, W = 573). Pour le reste de l’hiver, les
températures en 2012 correspondent sensiblement à celle d’il y a 10 ans.
4. Discussion
4.1.

Répartition des indices et des crottiers en 2012

Une limite altitudinale à 2000 m se dégage lors de l’analyse de la répartition des crottiers. Les
individus semblent préférer des zones assez hautes lors de l’hivernage. Ces conclusions sont
toutefois à tempérer car les secteurs bas (en dessous de 1900 m pour certaines zones, sous la courbe
des 1850 m pour d’autres) ont été sous-prospectés cette année. Il serait pertinent de prospecter ces
secteurs l’hiver prochain afin de déterminer si les grands tétras s’y aventurent ou pas. Néanmoins, il
est intéressant de noter que les secteurs les plus bas sont ceux où l’on rencontre le plus d’indices de
présence d’ongulés (nombreuses crottes de cerfs, de sangliers, d’isards et de chevreuils). Or, des
fortes densités d’ongulés, en synergie avec d’autres facteurs, peuvent contribuer à limiter les
populations de grand tétras (Nappée et Douhéret, 2004 ; Blanco-Fontao et Quevedo, 2006). Il serait
donc intéressant lors des prospections futures d’estimer les densités d’indices d’ongulés sur les
secteurs de prospection.
La répartition des indices tous types confondus n’est pas aléatoire. Elle apparaît agrégée avec des
« spots » où les indices sont nombreux, d’autres où les indices sont épars et enfin des zones
délaissées par les oiseaux. Ces « spots » sont moins visibles lorsqu’on regarde la répartition des
crottiers (ANNEXE 3 – CALQUE 4), mais leur distribution ne semble pas aléatoire pour autant.
Certaines zones semblent là encore délaissées par les grands tétras, notamment la zone en périphérie
de la piste de belges.
Enfin, les différences de répartition en fonction du sexe ne sont pas significatives. L’impression que
les altitudes basses sont plus utilisées par les femelles que par les mâles peut refléter le fait que les
13

certaines femelles aient leur site d’hivernage assez proche de leur site d’élevage des nichées (plus
bas en altitude).
4.2.

Comparaison des sites des résultats des prospections de 1998 à 2001 et des

résultats de l’année 2012
Trois points sont à noter lorsque l’on compare les résultats des deux périodes de prospection.
D’abord, les prospections de 1998 à 2001 montrent des indices plus épars sur le secteur de
Moscalló. D’autre part, les individus semblent être remontés depuis les dernières années. Enfin, des
indices sont apparus en 2012 dans un secteur qui semblait délaissé jusque là et qui correspond à la
partie haute de l’ancien tracé du sentier menant au Pla segalar.
 Une remontée des individus ?
Lors de l’hiver 2012, les indices de grand tétras ont été trouvés globalement à plus haute altitude
que lors des prospections 1998 à 2001. Ce résultat est particulièrement intéressant, et il serait
pertinent de regarder s’il l’on constate la même chose sur d’autres secteurs, et si cela se pérennise
dans le temps. Mais même s’il faut attendre les résultats des prochaines prospections pour statuer
sur une réelle remontée des individus, on peut d’ores et déjà émettre certaines hypothèses. Dans le
contexte de réchauffement climatique actuel, on pourrait envisager une remontée des individus due
en partie à une augmentation des températures et peut être également corrélée avec une remontée
des limites altitudinales des étages de végétation amorcée depuis quelques décennies. Il n’est
cependant pas possible d’aller au-delà de ces questionnements sur une période de temps de 10 à 13
années. Néanmoins il serait intéressant de poursuivre cette enquête sur une plus large période. Il
serait également envisageable que la remontée des individus ne soit que ponctuelle et due à un hiver
plus doux en 2012, sans pour autant parler de réchauffement global. Or, l’analyse des données
météorologiques de la station de Mantet vient infirmer en partie cette hypothèse. En effet, même si
l’hiver 2012 a montré des températures globalement plus douces sur les mois de novembre à janvier
que les hivers 1998 à 2001, le mois de février 2012 s’est montré significativement plus froid que
pour les années 1998 à 2001.
 Des oiseaux plus concentrés sur de petites zones ?
La distribution agrégée durant l’hiver 2012 parait difficile à expliquer. Elle est sans doute due à une
synergie entre de nombreux facteurs parfois difficilement appréciables. Le comportement social des
grand tétras en période d’hivernage n’est que peu connu, et Thiel et al. (2011) précisent que les
grands tétras se regroupent rarement à de faibles densités. Mais la population du secteur de
14

Moscalló a une densité particulièrement élevée par rapport au reste du département. Ces zones
pourraient donc être des lieux de rassemblements où les oiseaux se côtoient lors de l’hivernage.
Les causes d’un tel regroupement sont difficiles à évaluer. On peut envisager que la création de tires
forestières (ANNEXE 3 – CALQUE 5) entre les deux périodes de prospection ait pu fragmenter les
zones d’hivernage. Les rapports d’activité de la réserve de Py font notamment état d’une tire
ouverte pendant l’été 2002 et qui a coupé la place de chant en deux. Les préconisations de la réserve
concernant les travaux d’exploitation forestière n’avaient alors pas été respectées. Ces
aménagements ont modifié l’habitat du grand tétras sur Moscalló, et l’agrégation des individus
pourrait en être une conséquence. Il n’est cependant pas possible de faire autre chose que des
hypothèses dans cette étude, et là encore il faudrait mettre en relation les résultats obtenus sur
Moscalló avec d’autres secteurs dont l’habitat a été modifié ou non durant les 10 dernières années.
 Une recolonisation de certaines zones
Entre 2001 et 2012, le sentier menant au Pla segalar a été déplacé. L’ancien tracé passait par une
zone de crête favorable au grand tétras (ANNEXE 8), et le déplacement du sentier un peu plus à
l’Est devait permettre de préserver cette zones de la fréquentation humaine. Ces mesures semblent
avoir été, du moins en partie, efficaces. En effet, même si l’on a trouvé en 2012 moins d’indices sur
le bas de l’ancien tracé, la zone plus haute semble avoir été recolonisée depuis 2001. Ce constat est
encourageant, et montre l’importance de zones de quiétude pour l’espèce. A l’heure actuelle, même
s’il reste des personnes qui empruntent l’ancien sentier, la plupart des gens suivent le balisage et
passent sous la crête.
5. Conclusion
Les sites d’hivernage du grand tétras ont évolués depuis 2001. Même s’il est difficile d’en expliquer
la cause exacte, plusieurs pistes d’explications ont pu être avancées. Il est évident lorsqu’on connaît
le contexte de la réserve de Py qu’on ne peut dissocier la gestion du milieu et celle des activités
humaines. Le grand tétras étant une espèce très sensible, une partie de ce rapport a été consacrée à
l’estimation du dérangement subi par l’espèce sur le secteur de Moscalló. L’analyse de
questionnaires remplis par le public hivernal de la réserve a été réalisée afin d’évaluer l’évolution
des pratiques de loisirs et leur impact sur le grand tétras.

15

PARTIE III – EVALUATION DU DERANGEMENT SUR LE SECTEUR DE
MOSCALLÓ
1. Le grand tétras : une espèce sensible
La pression anthropique sur le milieu montagnard a fortement évoluée au cours des dernières
décennies. Dans les Pyrénées, elle se caractérise par une population humaine plus importante, et la
colonisation permanente de sites de hautes altitudes (stations de ski). Les pratiques ont également
évolué : les activités de loisirs sont en pleine expansion à tous les étages de végétation (Ménoni,
2010). Mais le milieu montagnard abrite une biodiversité fragile et sensible aux impacts des
activités humaines. La notion de dérangement humain est de plus en plus souvent au cœur des
problématiques de gestion au sein des espaces naturels protégés. Comment accueillir du public sans
que cela soit dommageable pour la faune sauvage ?
De nombreuses études s’intéressent actuellement à l’impact du dérangement humain sur la faune. Il
est désormais admis qu’il existe une relation entre la tolérance des oiseaux à l’approche de l’homme
et la taille de l’espèce (Fernandez-Juricic et al., 2004 ; Blumstein et al., 2005 ; Laursen et al., 2005 ;
Ménoni, 2010). Les oiseaux lourds, plus visibles et parfois moins agiles que les plus petits, se
montreraient plus méfiants vis-à-vis des prédateurs (Blumstein et al., 2005). Parmi les oiseaux
forestiers de l’étage subalpin, le grand tétras fait partie des plus imposants, et est sans doute le plus
sensible au dérangement. Il supporte en effet très mal le contact répété avec l’homme, ce qui le
conduit à fuir les zones trop perturbées (Ménoni et al., 1989 ; Ménoni et al., 2006). De plus,
l’espèce ne s’habitue pas aux activités humaines, souvent trop imprévisibles. Au contraire, les
individus se montrent plus sensibles au dérangement dans les zones les plus fréquentées (Whittaker
et Knith, 1998 ; Thiel et al., 2007).
L’impact des activités humaines sur le grand tétras se traduit par des effets directs et indirects.
L’augmentation du stress provoqué par la fuite face à un homme peut être mesuré par une analyse
des métabolistes de corticostérone (hormone du stress) dans les crottes de tétraonidés (Thiel et al.,
2008 ; Arlettaz et al., 2011 ;). Les études montrent que les individus vivant à proximité d’un lieu de
passage humain sont plus stressés que ceux peu soumis à l’homme. Des dérangements fréquents
peuvent aussi conduire à un stress chronique qui s’avère dangereux pour la santé de l’animal. Les
dépenses énergétiques dues à l’envol de l’oiseau dérangé peuvent également affecter la survie des
individus. Thiel et al. (2011) soulignent que l’espèce est particulièrement sensible en hiver à cause
de son régime alimentaire très peu énergétique. Les effets indirects sont encore peu étudiés, mais
certains auteurs s’y sont intéressés. Chez le Tétras-lyre, le taux de parasitisme serait plus important
16

dans des zones soumises à une forte perturbation humaine (Belleau, 1991 et Belleau, 2006 dans
Ménoni, 2010). Les espèces soumises au dérangement seraient en effet plus sensibles à la prédation
et au parasitisme. Les pistes et sentiers aménagés en périphérie ou à l’intérieur des zones de vie des
grand tétras peuvent de plus être des couloirs de pénétration pour les prédateurs ou pour les vecteurs
de parasites (Ménoni et Catusse, 1990). Enfin, le dérangement répété peut provoquer l’abandon des
nids par les poules de tétras et donc avoir une forte influence sur le succès de reproduction d’une
population.
Cette étude présente un essai de l’estimation du dérangement subi par le grand tétras sur un secteur
assez fréquenté. Elle utilise les réponses données par le public à un questionnaire volontaire
interrogeant les personnes sur leurs pratiques de la montagne. Les données récoltées sur 13 hivers
ont été analysées. L’étude tente de répondre à deux questions principales : Y-a-t-il eu une évolution
de la fréquentation et des pratiques depuis 13 ans ? Et l’impact des activités humaines sur le secteur
de Moscalló est il plus ou moins fort à l’heure actuelle ? L’interprétation des données sera faite avec
précaution car il est très difficile d’estimer les pratiques de l’ensemble des personnes fréquentant un
site sur la base des réponses d’une proportion non connue des individus. Toutefois, la prise en
compte des informations récoltées et des résultats obtenus pourra constituer une aide à la décision
lors de la mise en place de mesure de gestion.
2. Enquête sur les pratiques de loisirs au col de Mantet
2.1.

Mise en place et objectif de l’enquête

Depuis l’hiver 2000, des questionnaires ont été installés au niveau du col de Mantet et laissés à
disposition du public depuis. La volonté du personnel de la réserve reposait sur une amélioration
des connaissances du public fréquentant la réserve. Les questions portent sur le public (nombre de
personnes, classe d’âge, catégorie sociale), les raisons de sa venue, sa provenance, ses
connaissances (législation de la réserve naturelle) et ses pratiques (itinéraires). Les réponses sont
volontaires donc non-exhaustives mais permettent toutefois de récolter bon nombre d’informations
utiles aux gestionnaires.
2.2.

Fiche questionnaire et méthode d’analyse

La fiche questionnaire est présentée en annexe (ANNEXE 4). Les questionnaires des périodes
d’hivernage du grand tétras (1er novembre au 15 avril) ont été analysés pour les 13 dernières années.
Les données sont centralisées grâce au logiciel Access puis analysées. Dans un premier temps, des
régressions linéaires ont été réalisées grâce au logiciel R afin de tester l’hypothèse d’une évolution
17

des pratiques au cours des 13 dernières années. Dans un second temps, une méthode d’évaluation
du dérangement a été testée. Notons qu’il n’existe pas dans la littérature scientifique de méthode de
hiérarchisation du dérangement (Ménoni, 2010). La méthode appliquée ici est donc un premier test
de classification. Pour chaque questionnaire une note de 0 à 3 a été attribuée (Tb. II)
L’attribution se fait en fonction de certains critères mais peut dans certain cas être assez subjective.
Plusieurs critères ont été pris en compte : la présence de chien sur les sites vitaux du grand tétras, la
nature des activités sur ces secteurs (ski, cueillette, randonnée hors-sentier) et le nombre de
personnes (ANNEXE 5). Dans un premier temps, tous les questionnaires concernant un itinéraire en
dehors de la réserve de Py ont reçu une note nulle. Les questionnaires où les personnes avaient
spécifié n’avoir pas fait de balade ont également reçu une note de 0. Pour les personnes ayant
emprunté le sentier du Pla segalar ou la piste, la note s’est étalée de 1 à 3. Ont obtenu la note de 3
les questionnaires où les personnes déclaraient préférer partir à la découverte de la forêt, venir pour
des activités de cueillette ou avoir amené un chien. Les groupes de plus de 5 personnes sans chien
(considérés comme potentiellement plus impactant qu’un plus petit groupe) et étant restés sur le
sentier ou la piste ont reçu une note de 2. Ont également reçu une note de 2 les personnes déclarant
avoir fait du ski sur le secteur de Moscalló. Enfin les autres ont eu une note de 1. Lorsque
Tb II – Note de dérangement

0
1
2
3

Pas de dérangement
Dérangement potentiel faible
Dérangement potentiel fort
Dérangement fort avéré

2.3.

l’itinéraire n’était pas précisé, le dérangement a été
considéré comme potentiel. Les activités les plus
dérangeantes ont obtenu la note de 2 (ski, randonnée
hors-sentier,

présence

d’un

chien),

les

autres

questionnaires se voyant attribué la note de 1.

Résultats

 Fréquentation de la réserve au cours de ces 13 derniers hivers
299 questionnaires ont été recueillis au cours des hivers 2000 à 2012. 186 précisent le nombre de
personnes. Pour les autres, on a estimé le nombre minimal d’individus en fonction des autres
réponses. On obtient ainsi une estimation de 953 personnes. En hiver, le col est essentiellement
fréquenté par des gens qui connaissent le site et qui résident dans le département. Les principales
raisons de leur venue au col de Mantet sont la randonnée pédestre, en raquette ou en ski (37%) et
l’observation des paysages (23%). Plus de la moitié des personnes (55%) déclarent emprunter les
itinéraires de la réserve de Py. Même si la majorité des interrogés (52%) disent préférer rester sur le
sentier prioritairement pour le respect de la Nature, partir à la découverte de la forêt reste très
apprécié (36% des réponses). Les randonneurs sortent des sentiers balisés parce que c’est « plus
18

beau et plus sauvage ». Notons qu’une proportion non négligeable (15%) d’entre eux pense qu’ils
respectent ainsi mieux la nature. Très peu de personnes ont une connaissance précise de la
réglementation de la réserve naturelle et parmi ceux qui évoquent une réglementation concernant les
chiens (7% seulement), la plupart pensent qu’il suffit de le tenir en laisse.
 Evolution de la fréquentation et des pratiques
Des régressions linaires simples ont permis d’évaluer l’évolution de la fréquentation et des
pratiques au cours des 13 années d’enquêtes. Sauf cas particulier, seules les évolutions
significatives sont explicitées. Dans ce cas, sont données la p-value du test ainsi que le coefficient
de corrélation (cor). On note depuis 2000 une diminution significative du nombre de questionnaires
(p = 0,0339, cor = -0,613) complétés par saison ainsi qu’une tendance à la baisse du nombre de
personnes (p = 0,0526, cor = -0,571). Notons que le nombre de chiens amenés au col de Mantet
semble être stable (la baisse n’est pas significative).
Concernant les pratiques du public, on peut noter une augmentation significative de la pratique du
ski de randonnée (p=0,0212, cor = 0,654). Le nombre de personnes venant sans raison précise est,
lui, en baisse (p = 0,0143, cor = -0,683). Un sentier a gagné du public : celui menant au Pic des
Très Esteles, en dehors des réserve naturelles (p = 0.00266, cor = 0.782). Notons pour finir que la
pratique de la randonnée hors-sentier n’a pas significativement évolué.
 Estimation du dérangement sur le secteur de Moscalló
Pour chaque hiver, une note globale de dérangement a été calculée. Les notes de dérangements
attribuées sont en diminution significatives depuis 2000 (p = 0,0231, cor = -0,646).
2.4.

Discussion

Les résultats décrits plus haut sont à relativiser. En effet, le nombre de questionnaire récolté par
saison a subi une nette baisse depuis 2000. Celle-ci n’est pas forcément représentative d’une
diminution de la fréquentation mais plutôt d’une diminution du nombre de personnes répondant au
questionnaire. En effet, le public hivernal est représenté par des individus qui connaissent le col de
Mantet et y passent plusieurs fois dans une année pour la plupart. Or, on peut supposer qu’ils ne
remplissent pas un questionnaire à chacun de leur passage. Malgré cela, on peut réussir à tirer des
informations intéressantes. Tout d’abord, concernant les zones fréquentées, on peut voir que la
réserve de Py rencontre un bon succès : plus de la moitié des personnes venant au col la traversent.
Les deux itinéraires alors empruntés sont le sentier du Pla segalar et la piste des Belges. Malgré la
prévention menée notamment par le personnel de la réserve, il existe encore une pratique
19

importante de la randonnée hors-sentier. Certaines réponses dénotent un manque d’information du
public : certaines personnes pensent en effet qu’il est préférable de sortir des sentiers pour le respect
de la nature. Les efforts de sensibilisation sont donc à continuer, voire à renforcer. Le nombre de
chiens amenés au col n’est pas en baisse, mais tous ne pénètrent pas dans les réserves. Toutefois, un
certain nombre de propriétaires ne tiennent pas compte de la réglementation sur la réserve et
exposent la faune à un dérangement excessif. Là encore, les efforts de sensibilisation sont à
continuer. Parmi les résultats remarquables, on peut noter le succès croissant du Pic des Tres
Esteles. Il serait intéressant de demander aux personnes qui le fréquentent la raison de leur choix
afin de savoir si les contraintes imposées par une réserve naturelle entrent en compte. Notons
également une augmentation du ski de randonnée qui peut causer des problèmes aux grands tétras
en hiver. Cette activité a en effet été considérée comme particulièrement dérangeante car la plupart
des pratiquants ne restent pas sur les sentiers et traversent les sites d’hivernage. Le dérangement
occasionné pour chaque hiver semble être en baisse. Néanmoins, cette baisse peut être le reflet de la
diminution des questionnaires récoltés. Il n’est donc pas possible d’affirmer que les activités de
loisirs ont moins d’impact sur la faune en termes de dérangement à l’heure actuelle. Au contraire,
l’augmentation de pratiques potentiellement dérangeantes comme le ski de randonnée et
l’augmentation de la fréquentation des sites montagnards sur l’ensemble du massif pyrénéen depuis
quelques années tend à montrer le contraire. Les résultats obtenus font défaut ici et deux raisons
principales pourraient en être la cause : un biais dans le nombre de questionnaires analysés par
hiver, comme indiqué précédemment ou alors un biais dans le système de notation utilisé. Ni l’un ni
l’autres ne peuvent être testés avec les données dont on dispose, néanmoins, il serait intéressant de
tester cette méthode d’évaluation sur des échantillons plus représentatifs. Une enquête pourrait être
menée de manière plus systématique au col de Mantet par le personnel de la réserve afin de mieux
cerner la fréquentation du public et d’obtenir des réponses moins confuses à certaines questions,
notamment sur l’itinéraire emprunté.
2.5.

Conclusion

L’étude des questionnaires du col de Mantet ainsi que la cartographie des voies humaines horssentier réalisée en 2012 (ANNEXE 3 –CALQUE 5) montre que le secteur de Moscalló est assez
fréquenté. Les secteurs d’hivernage du grand tétras ne sont pas épargnés par cette fréquentation
même si on note une amélioration depuis le balisage du sentier du Pla segalar plus à l’Est de la
réserve. Les pratiques très impactantes pour la faune sauvage ne sont pas anodines (chien divaguant,

20

randonnée hors-sentier, groupes très nombreux), et ce malgré un rappel de la réglementation des
réserves au niveau du col de Mantet.

PARTIE IV – PROPOSITION DE GESTION
1. Sensibilisation et information des utilisateurs
Un travail peut être fait sur la sensibilisation et l’information des utilisateurs. Même s’il parait
impossible d’arriver à un dérangement nul sur les zones d’hivernage, une sensibilisation des usagers
sur le respect des sentiers peut permettre de canaliser la fréquentation sur des zones à enjeu moins
fort vis-à-vis de l’espèce. Les informations disponibles au col de Mantet ne mentionnent pas la
sensibilité de la faune sauvage. L’installation d’un panneau expliquant les bonnes conduites à tenir
en montagne pourrait être envisagée. Notons que ces informations sont disponibles sous formes de
livret notamment au Centre d’Initiation à L’Ecologie Montagnarde et aux locaux des réserves de Py
et de Mantet. Néanmoins, les personnes qui fréquentent le col ne consultent pas forcément cette
documentation avant de venir, d’où l’utilité d’un rappel sur place.
2. Définition de zones de quiétude
Dans certaines stations de ski, comme celle de Luchon-Superbagnères, le ski hors piste est interdit
et cette interdiction est matérialisée par des panneaux d’information destinés à sensibiliser les
skieurs hors-piste sur le sensibilité de la faune sauvage (Ménoni et al., 2006). Les espèces
concernées n’y sont pas explicitées (Fig. 7).
Mais si les pratiques hors-pistes peuvent être
proscrites dans l’espace d’un domaine skiable,
la situation en dehors des stations de ski est
différente. Une interdiction stricte du horspiste en montagne n’est pas pertinente et
impossible à faire appliquer.

Fig. 7 – Panneau d’information destiné à sensibiliser les skieurs hors-piste installé à Luchon-Superbagnères

Certains gestionnaires ont donc fait le choix de délimiter des zones de quiétude pour la faune
sauvage. C’est le cas pour le Bois de Ségure (commune de Ristolas, PNR du Queyras, Alpes) où un
secteur de tranquillité a été défini pour le tétras lyre. La zone a été matérialisée par des fanions et
des panneaux explicatifs (Fig. 8) explicitant la biologie de l’espèce et les bonnes conduites à tenir
(Guilhem et Charrier, 2011).
21

Fig. 8 – Panneau explicatif destinés à sensibiliser les randonneurs installé au bois de Ségure

La pose de tels panneaux indiquant l’espèce concernée et la zone où elle se trouve ne doit cependant
pas être systématique. Il faut en effet prendre plusieurs considérations en compte. La définition
d’une zone de quiétude peut avoir des retombées positives pour l’espèce, notamment dans des
secteurs très fréquentés pas le grand public. Néanmoins, elle peut exposer l’espèce à un public plus
spécialisé d’ornithologues, de photographes ou même de braconniers venus spécialement pour voir
l’espèce. Les galliformes, et notamment le grand tétras sont en effet des espèces très prisées pour
l’observation sur place de chant et la chasse photographique. Le dérangement induit par ces
activités peut s’avérer plus fort, car focalisé sur l’espèce, que celui généré par des randonneurs.
Concernant la réserve de Py, la fréquentation reste raisonnable, et la mise en place d’une zone de
quiétude bien définie ne semble pas pertinente. Cependant, il serait intéressant comme dit
précédemment d’installer un panneau sensibilisant sur les bonnes pratiques en montagne de manière
générale (pas de chien ou chien tenus en laisse selon la réglementation, rester sur les sentiers,
limiter son impact sonore, ramener ses déchets…). La prévention et la sensibilisation sur le terrain
par le personnel des réserves est indispensable. La répression par des agents commissionnés est
malheureusement encore nécessaire dans les cas les plus graves.
22

3. Actions entreprises sur le massif
La question du dérangement provoqué par les activités humaines est de plus en plus au cœur des
problématiques de gestion des espaces naturels. Sur le massif du Canigou, deux projets sont en
cours afin de limiter l’impact de la fréquentation humaine sur le milieu naturel :
- Le document d’objectifs pour le site Natura 2000 « Massif du Canigou » est en cours de
validation. Il intègrera une charte destinée aux utilisateurs des sites. La charte est un outil
contractuel où le signataire s’engage à respecter des engagements et des recommandations
garantissant des bonnes pratiques et le respect des milieux et des espèces qu’ils abritent.
- Un projet Gallipyr (le Réseau Pyrénéen des Galliformes de Montagne) est en cours sur la
canalisation des déplacements humains sur zone pilotes (Ménoni, 2010). Il consiste à évaluer le
dérangement subis par les galliformes à dire d’expert sur plusieurs sites « test ». Quatre variables
seront analysées pour hiérarchiser les sources de perturbations : la saison, l’intensité de l’activité, et
s’il est connu, l’importance du site pour l’une ou l’autre des espèces.
Dans le contexte actuel, ces projets sont particulièrement prometteurs. La sensibilisation du public,
au travers de la signalétique, d’actions de prévention, ou de mise en place d’outils tels que la charte
Natura 2000, couplée avec la mise en place de projets de recherche scientifique se révèlent être des
atouts considérables pour la conservation de la faune de montagne. La situation du grand tétras dans
les Pyrénées est loin d’être stabilisée, mais les efforts de conservation et d’amélioration des
connaissances et de protection doivent être poursuivis afin d’assurer la survie de cette espèce
emblématique dans nos montagnes.

GLOSSAIRE
Forêt de protection : Statut de protection permettant de lutter contre l’érosion des sols en
montagne et contre les risques naturels.
ACCA : Association Communale de Chasse Agréée
ZNIEFF : Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique
ZPS : Zone de Protection Spéciale
ZICO : Zone d’Importance pour la Conservation des Oiseaux
PNR : Parc Naturel Régional
ONCFS : Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage
Tire forestière : piste aménagée lors de l’exploitation forestière et destinée à se refermer à terme
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RESUME
Le grand tétras (Tetrao urogallus) est un galliforme emblématique des forêts d’altitude du Nord de
l’Eurasie. La sous-espèce aquitanus dont l’aire de répartition se limite au massif pyrénéen voit ses
populations diminuer depuis plusieurs décennies. La dégradation et la modification de l’habitat de
l’espèce sont considérées comme les principaux facteurs de ce déclin. Le grand tétras est de plus un
oiseau très sensible au dérangement, notamment en hiver et requiert une grande tranquillité dans ses
sites d’hivernage. La réserve naturelle nationale de Py abrite un noyau remarquable de grand tétras.
La plus grand place de chant est située à proximité immédiate du col de Mantet, lieu de départ de
plusieurs randonnées. Une cartographie des sites d’hivernage de l’espèce avait été réalisée en 2001
après 4 hivers de recherche d’indices de présence. La réactualisation de cette cartographie est
présentée dans cette étude. Les sites d’hivernage ont évolués en 10 ans et trois résultats notables ont
été identifiés : i) les individus sont remontés en altitude au cours de la dernière décennie, ii) la
distribution des indices a changé : ils sont plus agrégés en 2012, et iii) une zone correspondant à un
sentier désormais déplacé semble avoir été recolonisée. La fréquentation sur les sites d’hivernage a
également été évaluée grâce au dépouillement de questionnaires situés au col de Mantet. Enfin, une
méthode d’estimation du dérangement a été testée. En regard des résultats, il a finalement été
proposé d’installer un panneau d’information au col de Mantet destiné à sensibiliser le public sur
l’impact de la randonnée hors sentier.
Mots clefs : Grand tétras, Site d’hivernage, Dérangement, Activités humaines, Sensibilisation.

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